Le système continental et la Suisse 1803-1813

Occupation du Tessin.

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Nous ne pouvons nous étendre longuement sur ce coup de force brutale opéré au lendemain du jour où Napoléon multipliait à Wattenwyl ses assurances bienveillantes à l’égard de la Suisse. C’étaient encore les prétendues nécessités du système continental, c'était toujours la contrebande qui avaient servi de prétexte à l'expédition. Mais la manière dont l’entreprise fut conduite, les propos dont elle fut accompagnée dans les cours de Paris et de Milan, l’attitude de Napoléon lui-même ne laissaient aucun doute sur les véritables intentions de l'Empereur. Son but était l’annexion du Tessin au royaume d'Italie pour des raisons où le système continental n’avait rien à voir. Nous ne mentionnerons ici que les faits essentiels pour l'intelligence des événements.

Le 31 octobre 1810, sans avertissement préalable, un corps de 2000 à 3000 hommes de troupes italiennes, accompagné de douaniers, et placé sous le commandement du général Fontanelli, passait la frontière. I1 marchait sur Lugano et Bellinzone et occupait les jours suivants le val Misocco, dépendant des Grisons. Le gouvernement tessinois fut laissé dans l'ignorance sur les motifs de cette invasion; on le força quand même de lancer une publication interdisant l’accès du pays aux marchandises anglaises et prohibant en outre tous les produits manufacturés de coton ou de laine qui n’auraient pas été fabriqués en France ou en Italie, c’est-à-dire entre autres les étoffes suisses. En même temps, on cherchait par tous les moyens à isoler le pays de la Confédération. Les douaniers italiens, installés comme dans leur propre pays, occupaient les cols; on ne parlait déjà plus du canton du Tessin, mais des « bailliages italiens ».

L’émotion suscitée en Suisse par ces faits fut indescriptible. On devina rapidement l’inspirateur de l’entreprise, malgré les précautions prises par Napoléon pour se dissimuler derrière le vice-roi d'Italie !.

. ! «Je ne veux point m'adresser directement à la Suisse. Il n’y a pas de mal à ce que ce soit une querelle de vous à la Suisse. Après, On aura re-

cours à moi. » Corresp. Napoléon à Eugène Beauharnais, 6 octobre 1810.