Les serviteurs de la démocratie

262 LES SERVITEURS DE LA DÉMOCRATIE

mais sans pouvoir donner, dans ce court passage au Parlement, ni sa mesure, ni même, d’une façon lointaine, l'impression de ce qu’il était vraiment. 4

Les électeurs ont des caprices. Michel de Bourges les connut plus qu'aucun autre. Il échoua successivement dans plusieurs collèges électoraux, et particulièrement dans ceux de Bourges et d'Orléans. Ces échecs d’un homme si remarquable inspiraient à Louis Blanc d’éloquents regrets. L'éminent écrivain dè l'Histoire de dix ans aurait voulu que l'opinion démocratique ne perdit pas une seule de ses forces; il s’indignait de voir tenir à l'écart un tribun comme Michel de Bourges. « Que ceux qui redoutent le talent uni à l'énergie, s'en félicitent, nous dirons, nous, que c’est un malheur pour le pays! » Un tel historien portant un pareil jugement, c’est pour un homme politique le plus beau des éloges. Si l’on veut la preuve que Michel de Bourges méritait cette appréciation, il’suffit de jeter un coup d'œil sur sa carrière oratoire.

Il

ll était né le 30 octobre 4797 à Pourrières, petit village de Provence. Son père avait élé assassiné par les bandes royalistes qui, sous le nom de Compagnons de Jéhu, désolaient le Midi de la France.

Michel de Bourges, élevé par son grand-père maternel, connut de bonne heure l’exaltation des sentiments républicains ; il connut aussi la pauvreté; mais il la supporta noblement. Jusqu'à vingt-cinq ans, il fut obligé de gagner sa vie dans les emplois ies plus humbles : « J'ai été pion à Paris », rappelait-il quelquefois, et c’est grâce aux minées profils de ce dur métier