Les serviteurs de la démocratie
MICHEL DE BOURGES 263
que j'ai pu terminer mes études de droit. Il avait alors rencontré comme compagnon d'études et de maïîtrise d'études un camarade laborieux et distingué qui devait exercer sur sa vie la plus heureuse influence, c'était le vénérable M. Brisson, le père de l’éminent président de la Chambre des députés. M. Brisson doit être deux fois cher à la démocratie, il lui à donné son fils et Michel de Bourges.
Ce fut en 1826 que, sur les instances de son ancien camarade, devenu avoué à Bourges, le jeune Michel, renonçant aux misères de la vie parisienne, vint s’installer comme avocat dans la patrie de Jacques Cœur. Là, ce méridional ardent, passé Berrichon par la grâce de l’amitié, conquit bien vite au barreau du Cher la première place. Pendant quinze années il plaida dans presque tous les grands procès politiques. On le voyait, dit un contemporain, « l’œil fixé sur les juges, agitant d'une main convulsive ses notes éparses, s'imposant à l'attention par sa voix fauve et son geste empreint d'une impérieuse trivialité ». Sa rhétorique, j'ai hâte de le dire, tenait tout entière dans la phrase célèbre de Danton : « De l'audace, encore de l'audace, et toujours de l'audace! »
C'est Michel de Bourges qui osa dire un jour en s’adressant à des juges : « L'infamie du juge fait la gloire de l'accusé. » Cette attitude et ces paroles étaient d'un tribun bien plus que d’un avocat. Avocat dans le mauvais sens du mot, personne ne l'était moins que Michel de Bourges. Il ne cherchait pas, comme tant d’autres, à se faire un piédestal aux dépens de son client, il s’identifiait avec lui et se faisait parfois condamner avec lui. Ses véhémences de langage lui attirèrent à plusieurs reprises l'amende, la prison et la suspension de ses fonctions d'avocat. Rien ne le décou-