Louis XVI et la Révolution
LOUIS XVI. 7
viste, fait saisir les mises et distribuer ce butin aux pauvres. Pour lui, c’est le loto qu'il aime, en bon bourgeois. Cest un nouveau bonhomme Chrysale, pour le lourd bon sens, mais avec un peu plus de courage : c'est Chrysale osant tenir tête à Philaminte elle-même ; il laisse en effet la reine jouer la comédie à Trianon, mais il proteste en sifflant habituellement les acteurs. Même, quand l'affaire est plus sérieuse, il sait imposer son velo. Il échappe aux inconséquences que lui suggèrent les évaporés qui l'entourent, par la solidité de sa raison. Il refuse de laisser venir à la cour le vieux Voltaire, malgré les instances des courtisans. Il interdit longtemps la représentation du Mariage de Figaro et, mieux avisé que toute sa noblesse, il s’écrie, après s'être fait lire le manuscrit : « C'est détestable, cela ne sera jamais joué : il faudrait détruire la Bastille pour que la représentation de cette pièce ne fût pas une inconséquence dangereuse. »
C'était là faire preuve, sinon de sens artistique, du moins de bon sens politique, et d’une certaine force de résistance : ce ne sont pas pourtant les vertus énergiques qui éclatent chez lui. Sa qualité dominante, c’est la bonté : bonté réelle, qui ne se satisfait point par quelques mots à effet, à la Henri IV, mais qui veut des actes et des résultats. À son avènement, il songe aussitôt à soulager son peuple, surtout par des économies sur ses dépenses personnelles. Il écrit, le 1° juin 1774, au contrôleur général, l'abbé Terray : « Reste ce qui tient à ma personne. Sur cela, je suis heureux, vous avez raison de le dire, de pouvoir, sans compromettre aucun service publie, suivre dès à présent les mouvements de mon cœur, voulant, pour soulager d'autant mon bon peuple, retrancher le plus qu’il est possible sur les frais et dépenses de ma maison, et ne conserver que ce qu'il y a d’indispensable à la dignité de la royauté. » Lorsque ces économies forcent à supprimer une place à Versailles, il comprend et admet que le titulaire dépossédé se fâche, même devant son roi. Quand le duc de Coïigny apprit