Mémoire sur la Bastille

138 MÉMOIRES SUR LA BASTILLE

nés qui secouent et mordent le gibier en le rapportant, ils se fassent un plaisir d’être barbares, quand on n’exige d’eux que d’être soumis et fidèles. Mais vous ne l’ignorez plus, le voile est déchiré. Portez les yeux sur ces souterrains funéraires où n’est jamais descendu le jour; pour lui en procurer l'accès, il falloit deux événemens aussi singuliers l’un que l’autre : que j’y entrasse et que j'en sortisse. Le second, que je ne dois qu’à vous, m’assure que les connoissances dont je suis redevable au premier ne seront pas inutiles.

Il m'en coûtera ma patrie. La nécessité de chercher un tombeau dans des contrées étrangères, hélas! et ennemies, sera le seul prix de tous les sacrifices que je lui ai faits. Celui-ci est Le dernier : je serai payé de tous les autres s’il n’est pas infructueux. Mais non, il ne le sera pas : votre cœur pur et sensible s’émeut; vous frémissez, vous rougissez ; ce ne sera pas en vain. Dieu, quand vous protégez les hommes, tout-puissant pour opérer leur salut, donnez à l’Europe, au monde, le spectacle d’un prodige que vous êtes digne d’opérer. Parlez : à votre voix on verra s’écrouler les murailles de cette moderne Jéricho, plus digne mille fois que l’ancienne des foudres du ciel et de l’anathème des hommes. Le prix de ce noble effort sera la gloire