Mémoire sur la Bastille

168 NOTES

En Espagne il y a, je crois, deux ou trois tours mise aussi par le ministère au nombre des ressorts du gouvernement et des besoins de l’État, mais elles sont peu remplies, parce qu’elles ont eu jusqu'ici pour rivales les prisons de lInquisition. Un peuple qui porte ce joug, et le porte paisiblement, ne peut entrer comme terme de comparaison dans aucun calcul de politique relativement au premier.

En Italie comme en Allemagne, ce dernier est très peu connu. À Rome et à Venise il existe, cependant, des indices d’un pouvoir redoutable et d’un bastillage très caractérisé, il existe dans l’une un château et dans l’autre un tribunal qui sont également des outrages à la justice, et des armes toujours prètes pour le despotisme. Cependant, la multitude d’étrangers qui ne cessent de traverser ces contrées célèbres prouve que l'usage en est moins fréquent que l’appareil n’en est terrible. Quand un Anglois, un Hambourgeois, s’embarquent pour aller à Rome entendre des oratorios et admirer Saint-Pierre, ou danser en masque à Venise, leur famille ne les conjure pas, en tremblant, de se garder de l’ancien château d’Adrien ou de l’Inquisition d’État ; il n’y a point d’étranger annonçant qu’il va en France à qui l’on ne dise de se défier de la Bastille,

D'après les faits et l'opinion, la Bastille est donc un monument incomparable. C. Q. F. D.

24. P. 74. Que font donc ceux qui les ont détruites? Je n’apprécie pas ici les manipulations de M. Necker : j'ai eu beaucoup à me plaindre de lui, et plus encore de sa femme, qui étoit plus ministérielle que lui, mais ces foiblesses privées ne doivent point influer sur le jugement qu’un écrivain impartial peut porter des opérations des hommes en place. M. Necker conserve encore de nombreux partisans ; il a fait entrevoir en France, ce qui n’est pas un petit mérite, l’espoir d’une ombre de restauration. S'il n’avoit pas été contrarié par une guerre ruineuse, ou plutôt par l’ineptie dépensière qui dirigeoit malheureusement, de son temps, les forces navales du royaume, on peut croire qu’il auroit vraiment fait le bien.

Ce que l’on peut lui reprocher seulement, d’après les