Mémoire sur la Bastille

o2 MÉMOIRES SUR LA BASTILLE

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apporter les munitions qu’ils y avoient saisies.

Quelque temps après!, ces mêmes soupçons furent cause d’une méprise qui fit que quatre-vingt mille hommes demandèrent la tête de notre commandant, de ce généreux marquis de La Salle qui nous sert maintenant en qualité de soldat.

Nous ne négligeñmes rien de ce qui pouvoit apaiser nos concitoyens, dont, malgré leurs préventions et leurs emportemens, nous admirions lardeur patriotique. Mais le prévôt des marchands gâta tout en donnant, à notre insu, des ordres qui ne servirent qu’à les aigrir encore plus. Il les envoya aux Chartreux? et dans d’autres maisons où il ny avoit point d'armes, pour y chercher des armes. L’imprudent ne songeoit pas qu’ils en reviendroient plus furieux, et qu’ils auroient le

1. Le 6 août 1789. (Dusaulx.)

2. Les Chartreux de Paris habitaient le quartier du Luxembourg : on a donné leur nom à une rue moderne, bornant au sud l'École supérieure de pharmacie. — L'ordre donné par de Flesselles (13 juillet), au prieur des Chartreux, « ne permettoit pas de douter de l’existence des armes », firent observer au prévôt des maïchands Joly et Pons de Verdun, au retour de leur inutile expédition. « Je me suis trompé. j'ai été trompé », repariit de Flesselles. Et, comme ses deux interlocuteurs craignaient d’être mal reçus à leur district et d’être la cause innocente de quelque émeute contre les Chartreux, de Flesselles signa ce mot : « Les Chartreux ayant déclaré qu’ils n’avoient aucunes armes, le Comité révoque l’ordre qu’il a donné hier. » (14 juillet, vers dix heures du matin.)