Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales

LXVIITI : NAPOLÉON Ie ET LE ROI LOUIS.

Napoléon eût voulues dans un roi, mais il concevait d'un point de vue plus élevé que ne le faisait l'empereur la dignité de la couronne. Il sentait que cette façon de faire passer un prince d’un pays à un autre comme un administrateur de province avilissait le rang royal. Il comprenait également que c'était se jouer de la conscience humaine que de trancher ainsi les liens qu’un serment réciproque avait établis entre un roi et une nation. Rien ne devait alors faire supposer que le peuple espagnol opposerait une résistance opiniâtre aux armes jusque-là victorieuses de Napoléon. Cette pensée ne put donc exercer aucune influence sur la réponse de Louis; mais, avec les sentiments de loyauté qui lui étaient naturels, il avait pu discerner ce qu'il y avait eu d'équivoque dans les affaires d'Espagne, et il lui répugnait sans doute de sanctionner par son acceptation l’œuvre de la violence et dela perfidie. . Enfin il put croire que cette acceptation serait suivie de la réunion de la Hollande à la France, et qu'il était de son devoir de détourner ce malheur d’une nation qu’il avait mission de protéger. De quelque manière qu’on explique son refus, il est 1mpossible de méconnaître que des sentiments d'honneur, de conscience et de véritable dignité furent les seuls qui l’animèrent, et ce refus doit lui être compté, comme un titre d’estime, par la postérité. Ajoutons qu'il y avait dans la lettre de Napoléon des mots dont il devait à juste titre se trouver offensé. S'il était vrai, comme l’écrivait l'empereur, quela Hollande ne pôût sortir de ses ruines, et que, même avec la paix, il lui fût impossible de se soutenir, comment avait-il envoyé son frère régner sur ce pays, et n’était-ce pas se railler cruellement que d'avoir imposé de si lourds sacrifices à ce malheureux peuple en disant que ces épreuves, subies avec patience, préparaient dans l’avenir sa grandeur et sa prospérité ? Cette espèce de condamnation prononcée d'avance sur la Hol-