Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales

LXXVI NAPOLÉON Ix ET LE ROI LOUIS.

obtenir dans ses propres États les rigueurs qu'il exigeait de son frère. La fraude se pratiquait, non-seulement en France, mais dans l'entourage de l’empereur. Tandis que Louis refusait tout passeport aux voyageurs qui eussent voulu sortir de la Hollande par mer, les ministres de Napoléon délivraient des permis pour aller de Rotterdam en Angleterre (1). I y a plus: les consuls français en Hollande, vendant leur complaisance, ne craïgnaient pas de donner des certificats d'origine hollandaise à des marchandises anglaises destinées pour la France et l'Italie (2). On devine ce que le roi devait ressentir d'amertume en voyant méconnu le zèle qu’au détriment de la Hollande il mettait à l'exécution du blocus, pendant qu'il supportait la faute d’infractions commises par les agents mêmes de l'empereur. À plusieurs reprises, il avertit son frère de ces manœuvres. Une fois, il lui signalait l’arrivée en Angleterre de divers bâtiments venant de la Charente, de la Rochelle et d'Anvers, et chargés d’une telle quantité d’eaux-de-vie, que le prix en avait baissé tout d'un coup, sur le marché de Londres, d'un chiffre considérable (3). Une autre fois, il lui faisait parvenir par l'amiral Ver Huell un certain nombre de passeports, signés en blanc et d'avance, qui servaient à lintroduction de marchandises anglaises expédiées de Hambourg en Hollande (4). « Tôt ou tard, écrivait-il, V. M. saura la vérité; elle sera convaincue que l’on n’a tant crié contre les peccadilles de la Hollande que pour détourner l'attention, et cacher des fautes bien autrement considérables et essentielles. Si le

(1) Louis à Napoléon, 30 septembre 1807, p. 129. — Napoléon à Louis; 6 octobre 1807, p. 130.

(2) Napoléon à M. de Champagny, 9 octobre 1807, p. 130, note 2.

(3) Louis à Napoléon, 9 novembre 1807, p. 143.

(4) Louis à Napoléon, 16 décembre 1808, p. 190, 191.