Oeuvres diverses

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portes des palais ! Quousque terrible de l’armée de la misère, ouvriers sans ouvrage et sans pain, faces décharnées, femmes blêmes avec des enfants maladifs, étalant leurs cicatrices et leurs plaies au sein des assemblées envahies ! Ces députations fouguceuses qui jurent de n’avoir d’autres religion que l’Egalité, d'autre culte que la Patrie ; ces monceaux de vases et de débris sacerdotaux apportés par les fidèles à la Convention ; ces cloches et ces cercueils devenus des canons et des balles, ces prêtres échangeant avec joie leur titre mystique contre celui d'homme et de citoyen, quel enseignement pour les nations !

Les saints les plus vénérés tombent sans mot dire sous le marteau des iconoclastes, les reliques miraculeuses brülent sans que la foudre gronde. Les vierges qui sauvèrent des villes ne peuvent se sauver ellesmêmes. Une flamme jaillit de la Grève : elle dévore les ossements de sainte Geneviève et la chemise de saint Louis.

Qu’est-ce que les chaires de philosophie devant cette philosophie en action qui a le monde entier pour auditoire ?

Que sont les annécs de méditations et de calculs, les études profondes, les âges, les livres et les pays interrogés, les ruines fouillées, en face de l’instinet et de l’inspiration populaires ?

Auprès de cette voix formidable où hurlent tous les désirs et toutes les souffrances de la terre, que vaut la période d’un tribun ?

Les états généraux, complaisante machine à contresigner des édits, donnaient à la France le bon billet de La Châtre. Les troit cents électeurs de Paris, serrés autour du blond La Fayette et du compassé Bailly, constitutionnels bâtards, menteurs de liberté, eussent perdu la Révolution et eux-mêmes par amour du juste milieu, si on leur eût abandonné les guides.