Orateurs et tribuns 1789-1794

- 174 ORATEURS ET TRIBUNS.

Vergniaud ! Malheureusement on a retrouvé les registres d’écrou : les Girondins furent enfermés au Luxembourg, à l'Abbaye, à la Grande-Force, à la Conciergerie ; le registre de la prison des Carmes reste muet à leur égard. Les inscriptions ont pour auteur le citoyen Destournelles, le mot de Vergniaud à été écrit avec de l’encre qui a jauni. Détail curieux : au moment d'aller quérir un grand peut-être, les Girondins se souviennent des croyances de leur jeunesse; l’héroïsme antique, le génie stoïcien qui revivent encore se fondent dans la douceur chrétienne, ils se confessent à l’abbé Lothringer, à l'abbé Lambert, devant lesquels Brissot, qui ne fit point partie des onze repentants, répondit à ses amis qu'il croyait à une vie éternelle et à des récompenses dans l’autre monde.

Ils montèrent à l’échafaud sans faiblesse, au milieu de la foule imbécile qui hurlaït : vive la République ! sur laquelle ils promenaient des regards dédaigneux ou indignés. Vive la République! répondaient-ils, mais vous ne l’aurez pas. Leur mort fut donc irréprochable, pas plus noble cependant que celle des milliers d’innocents, de femmes, de vieillards, qui non seulement sur la charrette et au pied de la guillotine, mais devant Fouquier-Tinville, devant les hommes qu'on appelait dérisoirement des juges, à Paris, dans les départements et en prison, montraient du commencement à la fin le plus ferme courage et, par leur héroïsme, divinisaient la mort.