Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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assassins. Par cette déclaration ils intimidèrent et ils se subordonnèrent davantage leurs agens; il fallut tout imiter dans Robespierre, et sur-tout son hypocrisie; Robespierre fut adoré. J

Le procès de Danton êtde ses collégues fut conduitpar le tribunal révolutionnaire avecles formes qu’eux-mêmes ilsavaient imaginées pour hâter la condamnation des girondins. Danton commençait sa défense , et son début faisait comprendre qu'il espérait au moins entraîner le perfide Robespierre dans sa perte. Le président du tribunal lui ferma la bouche, en lui répétant sans cesse qu’il sortait de la question. Alors s’engagea une lutte orageuse : la sonnette du président, les cris de ses licteurs, la voix de Danton, les murmures du peuple, formaient un tumulte horrible. Les accusés insultaient à leurs juges. Fouquier-Thinville écrivit à la convention qu'ils étaient en pleine révolte. Elle rendit un décret pour faire terminer les débats. Les accusés furent ious condamnés, et pas un d’eux n’avait été entendu. On s'était à peu près borné à leur demander leurs noms, leurs demeures. Danton avait répondu : Ma demeure sera bientôt dans le néant, mon nom est écrit au Panthéon de l’histoire. Camille Desmoulins, interrogé sur son âge : J'ai l’âge du sans culotte Jésus, trente-trois ans quand il mourut. Hérault de Séchelles répondit : Je siégeais dans cette méme salle , où j'étais déteste des parlementaires.

Le peuple vit leur supplice sans joie, etmême avec quelques symptômes de douleur. Danton conserva , en allant à la mort, son regard terrible. On prétend qu'il répéta plusieurs fois : J'entraïne Robespierre, Robespierre me suit. Hérault de Séchelles exprimait sur sa figure noble et touchante le regret de mourir sans avoir lavé l’opprobre dont il s'était couvert. Gamille Desmoulins témoignait le regret d’avoir trop souvent appelé la vengeance, et trop tard l'humanité. Sa jeune femme, à laquelle il devait son retour à la pitié, ne voulut point de celle des tyrans. Elle errait à tonte heure autour de la prison de son mari : elle faisait de vaines tentatives; elle eût voulu exciter un soulèvement pour le délivrer. Bientôt son désespoir passa poùr une conspiration. On lui donna pour complices le général Arthur-Dillon et la plupart des suspects enfermés à Paris. Un nouveau crime fut inventé, qu’on appela conspiration des prisons. La veuve courageuse de Camille Desmoulins fut condamnée. On l’associa sur la fatale charrette avec les ennemis de son époux, avec les plus vils restes du parti d'Hébert, tels que Chaumette, les deux Grammont, et le prêtre parjure Gobet. Elle mourut comme Charlotte Corday , comme Mme Roland.