Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF. 14

plus de danger pour la république, d'autant plus que tout cela ne ferait preuve que contre peu de monde , puisque personne n’est nommé. 1

» Mais voyant à la tête des partis qui font actuellement tant de mal à notre pays , et jouissant, dans une place éminente , de la plus grande confiance, un homme très-compromis dans cette correspondance , et destiné à jouer ün grand rôle dans le rappel du prétendant , qu'elle avait pour but, j'ai cru devoir vous en instruire , pour que vous ne soyez pas dupe de son feint républicanisme ; que vous puissiez faire éclairer ses démarches, et vous opposer aux coups funestes qu’il peut porter à notre pays, puisque la guerre civile ne peut qu'être le but de ses projets.

» Je vous avoue, citoyen directeur, qu’il m’en coûte infiniment de vous instruire d’une telle trahison, d’autant plus que celui que je vous fais connaître a été mon ami, et le serait sûrement encore, s’il ne m'était connu; je veux parler du représentant du peuple Pichegru. Il a été assez prudent pour ne rien écrire ; il ne communiquait que verbalement avec ceux qui étaient chargés de la correspondance , qui faisaient part de ses projets et recevaient ses réponses. Il est désigné sous plusieurs noms, et entre autres, sous celui de Baptiste. Un chef de brigade nommé Badouville lui était atiaché et désigné sous le nom de Coco: il était un des courriers dont il se servait, ainsi que les autres correspondans. Vous devez l’avoir vu assez fréquemment à Bâle.

» Le grand mouvement devait s’opérer au commencement de la campagne de l’an 4 : on comptait sur des revers à mon arrivée à l’armée, qui, mécontente d’être battue, devait redemander son ancien chef, qui alors aurait agi d’après les instructions qu’il aurait reçues.

» Il a dû recevoir neuf cents louis pour le voyage qu’il fit à Paris, à l’époque de sa démission ; de-là vient son refus de l'ambassade de Suède. Je soupçonne la famille Lajolais d’étre dans cette intrigue.

» Il n’y a que la grande confiance que j'ai en votre patriotisme et en votre sagesse qui m'a déterminé à vous donner cet avis. Les preuves en sont plus claires que le jour; mais je doute qu’elles puissent être judiciaires.

» Je vous prie, citoyen directeur, de vouloir bien m’éclairer de vos avis sur une affaire aussi épineuse. Vous me connaissez assez pour croire comhien a dû me coûter cette confidence : il n’a pas fallu moins que les dangers que court mon pays pour vous la faire. Ce secret est entre cinq personnes : les généraux Desaix, Reignier, un de mes aides-de-camp , et un officier chargé de la partie secrète de l’armée , qui suit