Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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des anciens. {l s’y vit en butte à des accusations cruelles; il sut s’en défendre avec dignité. Il n’abandonna point son poste quand il y avait pour lui du péril à s’y présenter. Cette conduite ferme fut appréciée de tous les hommes capables de justice ; en sorte qu’on le plaignit d’avoir exercé un pouvoir disproportionné à ses talens. On eut bientôt à étendre à la plupart de ses collégues ce même genre d'intérêt. Quelque accréditée que fut la fable des immenses richesses amassées par Rewbell dans sa magistrature suprême , l'évidence la démentit à la fin.

Les deux conseils avaient nommé pour le remplacer Sieyes, à qui l’autorité déplaisait moins que ce collégue incommode. Il était alors ambassadeur auprès du roi de Prusse. On croyait lui devoir la neutralité de cette puissance, et les malheurs de la nouvelle guerre y faisaient attacher un très-grand prix.

Treilhard, depuis unan, avait remplacé Francois , de Neuchâteau. Les deux conseils étaient fatigués de la tutelle que le directoire exerçait sur eux et sur la constitution, et sur le système représentatif. Is lui refusèrent de consacrer les élimipations arbitraires qu’il se proposait de faire encore sur les dernières élections. {ls lui présentèrent le combat. La tribune retentit d’accusations contre les agens du directoire, et bientôt contre les directeurs eux-mêmes. Tout devenait une occasion de plaintes et d’emportemens ; tantôt on apprenait les revers de quelques-unes de nos armées, quelque art que le directoire mît à les pallier ; on lui reprochait alors avec fureur la destitution de plusieurs généraux, la nomination de Schérer, les actes par lesquels il avait tourmenté les nouvelles républiques, les concussions autorisées , l’ineptie de ses plans pohitiques et militaires. Tantôt la discussion s’élevaitsur un impôt nouveau. Le directoire, qui le sollicitait, était obligé d’avouer un déficit de cinquante-cinq , et bientôt de cent millions. Tout s’ébranlait à ce mot de mauvais augure qui avait ouvert la révolution. On demandait des comptes, on refusait l'impôt. On apprenait tous les jours que les caïsses publiques étaient vides ou qu’elles avaient été volées ; que la guerre civile éclatait de nouveau dans l'Ouest, et même dans le Midi, On déplorait le sort des patriotes égorgés ; on grossissait leur nombre. On accusait le directoire de les avoir livrés aux assassins, par la diffamation qui les flétrissait sous le nom d’anarchistes , et par le honteux désordre de ses mesures de police. À ce tableau quelques orateurs ajoutaient des considérations d'une politique plus étendue, qui révélaient tous les vices du système, moitié révolutionnaire et moitié consUtutionnel, où l’on était engagé. On remarquait parmi ces adversaires du directoire Boulay , de la Meurthe, Francais,