Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

APPENDICE. 254

vent les moyens dont il disposa ; il ne doutait pas du succès le plus plein , le plus entier. Cette confiance, il fant le dire, était partagée par tout ce qui l’approchaïit, nationaux et étrangers. Toute la jeunesse militaire de Paris regardait sette expédition de Russie, comme une grande partie de chasse de six mois. Toute l’armée se précipitait vers cette entreprise avec l'assurance du succès, l'appétit de l'avancement et la voracité des dotations. Tout militaire qui n’en faisait pas partie, accusait sa mauvaise étoile , ou l'injustice de l'empereur. Des victoires rapides semblèrent autoriser cet enthousiasme. À Wilna , à Smolensk et sur les bords de la Moskowa , les armes francaises et celles de la confédération rhénane se couvrirent d’une gloire ineffacable. Les aigles furent plantées sur les remparts de Moskow; mais c'était là que devait se trouver la fin des succès et le commencement des revers. On sait quelle déplorable catastrophe hâta l'issue de cette campagne. Il n’entre point dans le plan de ce précis d’en retracer les tristes détails. Tandis que les élémens conjuraient contre l’héroïsme de l’armée , l'audace d’un chef de complot était sur le point de changer le gouvernement. Malet et ses complices, furent mis à mort le 29 octobre 1812; mais il était plus facile de punir un traître, que de dompter le climat du Nord. Un bulletin de l’armée de Russie , peut donner une idée de son horrible situation : « Cette armée » si belle le 6 (novembre 1812 }, y est-il dit, était bien dif» férente dès le 14, presque sans cavalerie, sans artillerie, » sans transports,

» Le froid s’accrut subitement, et du 14 au 15 et au 16, » le thermomètre marqua seize et dix-huit degrés au-dessous » de glace. Les chemins furent couverts de verglas. Les che» vaux de cavalerie, d'artillerie, de train, périssaient toutes » les nuits, non par centaines, mais par milliers , sur-tout » les chevaux de France et d'Allemagne. Plus de trente » mille chevaux périrent en peu de jours : notre cavalerie se trouva toute à pied; notre artillerie et nos transports » se trouvèrent sans attelages ; il fallut abandonner et dé» truire une bonne partie de nos pièces et de nos muni» tions de guerre et de bouche, etc. » Deux jours après Ja publication de ce bulletin, Napoléon reparut à Paris. IL y était arrivé en fugitif, en répétant : « il »’y qu'un pas du sublime au ridicule. » Au retour du printemps il se remit à la tête de ses troupes , afin de conténir ses alliés d’Allemagne dont ses revers faisaient chanceler la fidélité. La France fit d’incroyables sacrifices : parmides mesures que l’on crut utiles au salut de l'empire, il ne faut pas oublier la maladroite invention des gardes d'honneur qui aliénèrent

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