Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

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prolétaires avaient demandé cette publicité; c’est ainsi qu’à mesure qu'ils se trouvaient contrariés, ils franchissaient les espaces : enfin les scélérats triomphèrent de tous les obstacles. Ce tribunal de boue et de sang condamna indistinetement à mort et les prétendus arislocrales et leurs prétendus agents. Cette nouvelle opération consomma l’œuvre du crime.

Que pouvait-on espérer d’une troupe de misérables, dont les têtes étaient exaltées par des excès de table, par le désir de s'emparer des fortunes, par la soif dévorante de s’abreuver du sang de leurs concitoyens ? Que pouvait-on espérer d’un tribunal où un juge eut linfamie de déclarer qu'il condamnerait constamment à mort, attendu que les opinions n'étaient pas libres? Cette pusillanimité coûta la vie à un des accusés qu’une voix lournée aurait peut-être mis hors de débat. Je dis peut-être, car il n’est pas cerlain que les brigands s’en fussent rapportés à ce jugement. Un autre juge dit : De Rochemont n'est point coupable, mais c’est un homme dangereux ; il sera un jour le chef de nos ennemis; j'étouffe Coriolan. Que pouvait-on attendre d’un tribunal où depuis l’on put dire impunément : Cet homme ne mérite pas la mort, mais puisque enfin il faut avoir deux consciences; je le condamne à mort: dis ce que tu voudras, je te condamne à mort? Que pouvait-on attendre d’un tribunal qui eut l’atroce impudeur de publier que ses jugements n'avaient pour base aucune règle quelconque, aucune loi particulière, aucune orgamisation ? Tibère , ce Tibère dont le nom seul fait gémir l'humanité, était vertueux en comparaison de ces juges. Jamais, non jamais il n’eut la frénésie de se