Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire
102 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR
au matin, à la tête de sa Garde, complimenter le maréchal sur cette brillante retraite (1).
Le 9 juin, l'Empereur ordonna de marcher en avant. Il fit traverser la Passarge à Murat, à Soult et aux différents corps qui étaient venus à notre secours. Le maréchal suivit : nous reprîmes ainsi l'offensive. On poursuivit l'ennemi jusqu’à Heilsberg, où nous arrivâmes le 11, sur les 4 heures du soir. L’ennemi avait entouré cette ville de redoutes et s’y était arrêté pour nous combattre. Attaqué le 10 par Soult et Murat qui nous devançaient, il avait fait une vigoureuse résistance, et la ville d’Heilsberg n'avait pu être enlevée (2).
(4) J'avais rempli, comme on vient de le voir, quelques missions importantes, une notamment que je me rappelle avoir été marquée par un incident curieux,
Un jour, Ney m'envoya au quartier général du maréchal Bernadotte, qui m'invita à diner. Le cours de la conversation conduisit à parler de la nomination du nouveau prince. Un officier, peu versé dans les connaissances héraldiques, demanda à Bernadotte ce que signifiait son nouveau titre de prince de PonteCorvo et à quel grade il correspondait, si c'était plus qu’un général, qu'un colonel ou qu’un Capitaine. « Je suis prince, répondit Bernadotte, parce que dans une monarchie, il faut des rangs et certaines prééminences sociales: je suis prince dans lordre civil, comme vous êtes colonel, capitaine, lieutenant dans l’ordre militaire; mais les dignités civiles n’ont aucun rapport avec les grades militaires. » L’armée vit la nomination de Bernadotte et celle des autres maréchaux avec regret : elle avait accepté avec plaisir l'Empereur de la République; elle ne pouvait montrer le même empressement à reconnaître les princes de la nouvelle monarchie. (Note d'O. Levavasseur.)
(2) Benningsen, qui s'était replié, dès le 8, sur son camp