Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

TRAVAIL A L'INTÉRIEUR DE LA FRANCE (1793-1795). 111

gendarmerie, son collègue aux États généraux, le marquis d'Apchier. D'Apchier devait amener avec lui sur les Pyrénées les officiers du régiment de Vivarais réfugiés à Constance. En s’embarquant pour Barcelone, il commit une de ces étourderies familières et fatales aux émigrés, qui pour d’Antraigues iui-même devait être une leçon inutile; il oublia et perdit un portefeuille contenant la liste de ses principaux coopérateurs. Ledit portefeuille fut porté au ministre de la république à Gênes, et la mission de d’Apchier avorta ainsi dès le début. C’est du moins ce que raconte avec une joie non dissimulée Froment, qui avait réussi à se glisser, muni d’une lettre du comte d'Artois, dans le camp de Ricardos.

D'Antraigues comptait avec raison que le courage des Espagnols dans leur guerre offensive serait doublé par leur haine contre l'impiété française, et néanmoins il jugeait leur présence dans le Vivarais insurgé propre à contenir les passions religieuses, à empêcher les protesfants d’être victimes de la réaction monarchique. Il ne faudrait pas contre ceux-ci, disait-il, des mesures « trop ostensiblement sévères... Les excès de la vengeance iraient à des bornes embarrassantes pour la politique (1). »

Après fous ces beaux projets, je ne vois guère entre

(1) D’Antraigues au marquis d'Apchier, 22 août 1793. (A.F., France, vol. 63%, £ 38. — Fnrouexr, Précis de mes opérations, ete., p. 10%.)

« On s’étonna de voir paraître tout à coup sur terre de France M. Ricardos à la tête d'une poignée d'Espagnols, sans magasins, sans moyens de retraite. C’est que le comte d’Antraigues.. avait rêvé dans son lit un grand rassemblement au camp de Jalès, qui n’attendait pour agir qu'un noyau de troupes réglées. Il l'avait rêvé, M. de Las Casas l’avait cru, la cour de Madrid n’en avait