Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
180 CHAPITRE QUATRIÈME.
Les Russes ne le traitaient guère mieux que les royalistes français. À son arrivée à Vienne, où il avait rejoint Mordvinow, il avait bien obtenu de ce diplomate un certificat approbateur de sa conduite à Venise, mais à côté de Mordvinov il avait trouvé un ennemi auquel il ne s'attendait pas, le comte Razoumowsky, ambassadeur de Russie à Vienne.
Razoumovsky avait son opinion faite sur le nouveau venu et le tenait pour un aventurier. À l'annonce de son arrivée, il avait représenté au cabinet autrichien que la présence de cet homme à Vienne était de nature à irriter Bonaparte, et à sa cour qu’elle pourrait nuire aux intérêts russes (1). Paul L* lui répondit par la décision suivante : Si M. d'Antraigues reste à l'étranger, ses appointements seront supprimés; s'il vient en Russie, un passeport lui sera délivré pour Riga, sans qu'il puisse séjourner ni à Moscou, ni à Pétersbourg. Cette mesure était générale et atteignail tous les agents royalistes en Italie payés par la Russie. D'Antraigues ÿ vit un effet particulier de l'hostilité toujours active de d'Avaray, el en appela de l'autocrate mal informé à l’autocrate mieux informé; il demanda la permission de porter à Pétersbourg sa justification verbale. Se croyant victime des
dits, dit avoir rencontré à Vienne « le comte et la comtesse d'Antraigues et leur fils âgé de dix ans, à la queue duquel on attachait une sonnette, parce qu’il échappait sans cesse à la surveillance de ses parents. Le comte d'Antraigues avait épousé une cantatrice célèbre, Mme Saint-Huberty; on pardonnait cette alliance, et parce que M. d’Antraigues était un homme supérieur, et parce que Sà femme était aimable et utile dans la société. »
4) « Homme d’un esprit inquiet et brouillon, sans cesse occupé de projets et d'intrigues qui ne peuvent que compromettre les cours et compliquer mal à propos les affaires. » (Lettre à l'empereur Paul, le 3/14 octobre 4797. — À. M.) |