Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
A DRESDE.—CZARTORYSKI, COBENZL (1802-1804). 223
tout en place, sans qu’il restât aucune trace de ce vol momentané (1). Il n’était pas scrupuleux à cet égard; à Milan, Bonaparte, en dépit de ses belles protestations, lui avait donné l'exemple.
Enfin, le 6 novembre 180%, une convention secrète unit les cours de Russie et d'Autriche en vue d’une coalition prochaine, et d’Antraiques put croire n'avoir pas été étranger à ce résultat.
Dans ces combinaisons diplomatiques conduites en vue de l’abaissemeut de la France, était-il du moins question de la restauration des Bourbons? D’Antraiques n'y pensait plus guère; mais en Russie les droits de Louis XVIII avaient toujours été mieux reconnus que partout ailleurs; de là la question posée par Czartoryski à son correspondant : Serait-il utile ou dangereux aux puissances européennes de reconnaître Louis XVII? La réponse qu'il reçut, et qui fut communiquée au cabinet de Vienne, portait en substance : Jusqu'ici, cette reconnaissance n’eût servi à rien en face d'un peuple livré à la frénésie démocratique. Aujourd'hui la France est revenue à ces principes monarchiques qui sont la loi des grands empires. Les jacobins eux-mêmes les ont établis, Bonaparte les représente. Il à trois appuis l'armée née de la Révolution, le peuple nanti des biens nationaux, les révolutionnaires jaloux de s'assurer l’impunité de leurs crimes. Louis XVIII a certaines qualités avouées de tous, beaucoup de connaissances, de l'esprit, des intentions sincères de clémence; enfin et surtout il est roi, mais il est à la merci de ses serviteurs. Il faut donc le reconnaître, travailler pour lui sans lui, et lui faire souscrire trois conditions : l'état à conserver à
(1) D'Antraigues à Cobenzl, 30 novembre 180%. (A. V.)