Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

84 CHAPITRE TROISIÈME.

une fidélité rigoureuse. Il eût été tenu, en raison même du choix qu'il avait fait, à une réserve de nature à relever l’un et l’autre aux yeux du monde; et cependant il paraît avoir donné à sa femme, dans sa maison, les rivales les plus vulgaires. Il ne faut malheureusement jamais ni nulle part chercher dans cette vie quelque chose qui soit absolument droit ou absolument pur. L'intelligence est brillante, l’activité des idées infatigable, mais l'élévation du cœur, la fermeté du caractère, la dignité de la conduite sont trop souvent absentes.

À l'étranger, d’Antraigues fut d'abord un publiciste contre-révolutionnaire, puis il devint un des nombreux émissaires de Louis XVI et des princes dans leurs négociations plus ou moins secrètes avec les puissances étrangères. De 1790 à 1799, il annonça à grand bruit la publication d’un compte rendu à ses commettants, qui ne vint jamais; l'avenir de la monarchie le préoccupait plus que son propre passé, ct il développa dans une série de brochures les récriminations, les plaintes, les protestations du parti royaliste. Ces écrits, imprimés non sans peine en Italie, pénétraient difficilement en France, et opposaient un faible contrepoids à la publicité des journaux et des pamphlets révolutionnaires. Quelques-uns furent traduits en italien et devaient servir à combattre la pro-. pagande, déjà sensible à l'étranger, des idées françaises.

D'un bout à l’autre de ces ouvrages improvisés on trouve refournées en tous sens deux ou {rois pensées : la captivité et par conséquent la déchéance morale du roi, l'excellence de l'ancienne constitution, la responsabilité des philosophes dans l'œuvre de 1789, et surtout l'infaillibilité de l’auteur mise en regard des erreurs de ses antagonistes politiques. Les personnes y tiennent au moins.