Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt
4e avril 1803.
Je viens de visiter le nouvel hôtel que Lucien Bonaparte fait disposer (1). Il montre beaucoup de goût dans cette installation et ne regarde pas à la dépense dès qu'il est question des beaux-arts. L'hôtel qu'il vient d'acheter était déjà parfaitement décoré et distribué fort commodément; mais tout élégant qu'il fût, il n’était pas dans le dernier style, et sa distribution intérieure n’avait pas de caractère grandiose. Aussitôt en possession, Lucien a abattu les cloisons et remanié les appartements. Un de ses intimes, qui me promenait dans l'hôtel en disant combien sa décoration antérieure était belle, résuma son appréciation par ces mots : « C’était du dernier fini! » Il me montra en détail les améliorations opérées; ici, un parquet plus soigné; là, une boiserie plus riche; plus loin, des tapisseries plus rares: ailléurs un plafond agrandi. Il estimait ces travaux à un million de livres et ajouta : « Ma foi, il faut avoir le courage et le bon esprit de Lucien pour entreprendre un pareil changement! » Après les premiers remaniements, qui avaient demandé plusieurs mois, Lucien vint les inspecter; il ne les trouva pas à son gré et
(1) Lucien habitait l'hôtel de Brienne, situé rue Saint-Dominique et qui s'étendait en profondeur jusqu’à la rue de Grenelle.