Une mission en Vendée, 1793

210 UNE MISSION EN VENDÉE, 1793.

pour faire souffrir, est peu propre à la vigueur du tempérament qu'une révolution exige. Subissons la loi de l'inévitable destinée. Nous voulons être libres; sachons supporter les maux attachés à une crise révolutionnaire, pour obtenir le bonheur et les jouissances qu’elle nous assure. Que les femmes sachent refréner leur humanité et ne s’abandonnent point à un premier penchant qui les trompe. Clémence est souvent barbarie. Vouloir épargner un sang coupable c’est faire couler le sang innocent. Vous donc, citoyennes, vous Rochelloises, qui avez pris de si beaux engagements, sachez vaincre votre faiblesse.

Une autre réflexion me presse et demande à s'échapper. Elle tient à la question des dangers du modérantisme que j'ai déjà discutée. On est parvenu dans le Midi à tromper le peuple par un système de noires calomnies contre les vrais patriotes qu'a suivi bientôt un système de persécution non moins atroce et cruel. Avec le mot d’ultra-révolutionnaire on a décrié le plus vertueux montagnard, et parce qu’un homme était plus mûr que les autres pour la liberté, parce qu’il voulait hâter son règne, il a été frappé du poignard ou jeté dans l’horreur d’un cachot. J'ai connu des citoyens d’un caractère âpre, impérieux, insociable; ils parlaient souvent de sang; ils peignaient la Révolution sous de noires couleurs, même en prenant sa défense; leurs cheveux se hérissaient à la vue d’un homme faible, parce qu'ils voyaient tous les maux qu’entraîne son caractère. On a calomnié ces hommes, on a préféré l’aménité du modérantisme, mais ces hommes sont utiles dans une crise révolutionnaire, ils méritent l'estime du peuple, parce que les ennemis du peuple les redoutent. Occupez-vous très peu dés hommes. Ils sont des instruments, bons aujourd’hui, dont il faut se servir, mauvais de-