À la recherche de la fortune du duc d'Orléans (1793-1794) : lettres inédites du général Montesquiou à Francis d'Ivernois
16 REVUE HISTORIQUE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
Que d'obligations ne vous aurai-je pas mon cher ami, si vous menez cette affaire à bien, et que vous vous en applaudiriez si un jour, comme je l'espère, vous connaissez l’estimable jeune homme pour lequel je vous ai demandé assistance. Le sort des Français qui ont échappé aux fureurs de la Convention nationale empire tous les jours. Danton, après un sommeil de six mois, s’est réveillé pour faire décréter la confiscation des biens de tous ceux qui ont des enfants émigrés. Jugez à quel point les ressources sont nécessaires aux victimes de tant d’atrocités.
Au milieu de tous les brigandages qui s’exercent en France, le change se relève tous les jours. Il est à présent à 40, et c’est pour moi un nouveau genre de persécution. Cela dérange toutes mes spéculations. Je ne peux croire cependant que cet état de choses soit durable. Plus j'en vois, plus je me persuade que ce Robertspierre si méprisé vise au trône ou à l’équivalent. En faisant outrer aux autres la mesure des atrocités, il espère se faire pardonner sa puissance en faveur des adoucissements qu’il accordera. Je ne peux pas expliquer autrement tant de cruautés inutiles.
Votre Genève ne va pas mieux. On y arrête les lettres sous prétexte d’envois de faux assignats, on laisse moins que jamais passer les denrées. Heureusement Salomon", qui me mande cela, va de mieux en mieux,
Adieu, mon cher ami, portez-vous bien, aimez-moi toujours un peu. Vous y êtes obligé par tout ce que vous avez fait pour moi, et par le tendre attachement que vous m'avez inspiré.
La première fois que je vous écrirai, le papier sera plus grand et il n’y aura pas d’enveloppe.
1. Nous ignorons qui est désigné par ce nom. — O. K.