Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

X

Nous ne saurons vraisemblablement jamais quels sentiments agitèrent l’âme du pauvre Butré quand il se vit si brusquement rejeté loin du port où il espérait se reposer durant les dernières années de son existence. Toute la première année de son séjour forcé dans la capitale se dérobe à nos yeux; ni lettres (ce qui ne saurait nous étonner), ni comptes ne subsistent. Le premier signe de vie que nous retrouvions est une lettre de lui, adressée au citoyen Fritz et datée du 12 août 1793.

« Citoyen, j'ai chargé le citoyen Hammerer de vous donner de mes nouvelles, ayant eu l’occasion de lui écrire plusieurs fois. Ne soyez point inquiet, je vous prie, à mon sujet; je me porte assez bien et pour mon loyer, vous voudrez bien attendre à mon retour. Il y a dans mon appartement de quoi vous payer dix ans. Vous avez la clef, vous pouvez la décacheter et voir dedans, s’il n’y a rien qui soit endommagé...

« J'ai toujours resté ici depuis mon départ et j'y resterai jusqu’à ce que nous puissions jouir de la liberté pour laquelle nous faisons tant d'efforts pour acquérir. Il faut espérer que la Constitution que nous venons de jurer sur l'autel de la patrie nous fera réunir tous nos efforts pour en jouir bientôt. À mon âge, mes eftorts sont bien peu de chose mais mon zèle, que vous connaissez, sera toujours le même et ne variera pas. Dieu veuille me conserver pour voir la fin heureuse de tout cela !

« La fête de la Fédération s’est très bien passée et il n’y à pas eu le moindre inconvénient. J’ai dîné ce jour-là avec un des citoyens qui vient de Strasbourg et qui m'a dit que tout y était bien cher. C’est de même ici et cela augmente tous les