Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

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vrira aux productions de notre sol et aux produits de notre industrie d'immenses débouchés dans les provinces ottomanes qui bordent la mer Noire, en Russie, en Pologne et en Perse, et transportera facilement, promptement et à moins de frais, dans la Méditerranée, les avantages de ce commerce du Nord qui, malgré toutes les primes et autres prétendus encouragements, n’existera jamais pour nous d’une manière certaine tant qu'on persistera à le continuer exclusivement par les glaces et les écueils de la Baltique. « Quant à l'Angleterre, la situation de la France ayant changé pour elle comme pour tous les autres États de l’Europe, il est évident que l’on ne doit plus rechercher la même espèce de rapports avec elle qu'on avait désiré d'établir dans ces derniers temps.

« Au milieu de toutes les tyrannies de l'Europe coalisée contre la France, l'alliance de l'Angleterre lui était nécessaire, soit pour le maintien de sa liberté, soit pour l'entière conservation de son territoire dont le démembrement devait étre le prix de cette conjuration royale, comme vient de le prouver la récente publication du traité de Pavie. Dans un temps où les vœux et les démarches secrètes du gouvernement ne tendaient qu'à resserrer les liens de la France avec les maisons d'Autriche et de Bourbon, l'intérèt public prescrivait impérieusement de détruire une alliance de famille dont l’objet réel était de miner sourdement et ensuite de renverser la liberté, par une alliance nationale destinée à la maintenir et à la défendre.

« Si quelque chose, en effet, peut prouver combien cette alliance était alors nécessaire, combien la France devait y trouver un appui suffisant pour sa sûreté et sa liberté, c'est l’acharnement avec lequel cette mesure était traversée, tantôt ouvertement, tantôten secret, par les ministres et conseillers d'alors, connus par leur altachement aux intérêts de la maison d'Autriche et de la maison de Bourbon autant que par leur haine ou leur éloignement pour la cause de la liberté. On n’a point oublié avec quelle obéissance docile, et plus souvent avec quelle ardeur de zèle, les écrivains de pamphlets (1), de gazette et de suppléments de journaux, payés par ces ministres, s'étaient attachés à décrier tout ce qui pouvait tendre à faire paraître l'Angleterre d’une manière imposante et décidée en faveur de la France. On n’a point oublié le ton d’assurance avec lequel ils nous répétaient cet adage de l'ancienne ineptie diplomatique : « qu'il ne doil point y avoir d'alliance entre

(1) Je ne me souviens de tout ce que ces messieurs ont écrit contre moi que parce que j'aime à me rappeler la manière dont M. Guadet m'a défendu,