Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793
66 DANTON ÉMIGRÉ.
divise en plusieurs bandes, afin de multiplier et d'accélérer les ravages. Un détachement de ces brigands pousse jusqu'à FairHill, à demi-lieue de la ville, où était située la maison du docteur Priestley. Cet ami des hommes et de la liberté est obligé de fuir avec sa famille; quelques minutes plus tard il serait tombé entre les mains des incendiaires. Furieux de ce qu’il leur était échappé, ils mettent tout en pièces, détruisent le laboratoire et rasent la maison. Ce fut ainsi que se passa la terrible nuit du jeudi au vendredi.
« En vain les magistrats et les principaux habitants se concertèrent le lendemain pour le retour de l'ordre, ils manquaient de force armée pour en imposer à ces scélérats, que leurs mesures de prudence et leurs exhortations ne firent qu'irriter, de sorte qu'ils continuèrent les mêmes excès pendant tout le vendredi et la nuit suivante.
« Le samedi matin, nouvelles tentatives de la part du lord Aylsiord et de quatorze des principaux habitants de Birmingham ou des environs pour calmer les séditieux, et toujours sans succès. À sept heures du soir, ce peuple effréné revint à la charge et marqua plusieurs maisons dévouées aux flammes. À plus d’une lieue de Birmingham, la route de Londres était couverte de bandits qui allaient grossir la troupe. On compte plus de quinze maisons détruites ou brûlées. On a remarqué dans les chefs de cette insurrection le plus grand sang-froid, tandis que les exécuteurs de leurs ordres étaient presque tous ivres. S'ils trouvaient une maison condamnée à la destruction qui fût isolée, ils y mettaient le feu pour avoir plus tôt fait; tenait-elle à une maison amie ou qu'ils voulussent épargner, ils en enfonçaient les portes, la pillaient et emportaient chez eux les meubles comme s'ils les eussent achetés à une vente, puis ils revenaient y mettre le marteau. La belle maison de M. Humphries, celle du célèbre imprimeur Baskerville, mort il y a quelques années, furent démolies par trente de ces misérables avec autant d'ordre et de calme que si le propriétaire les eût payés à tant par jour.
« Enfin, le régiment des Bleus, d'Oxford, fut commandé samedi pour Birmingham, ainsi que les troupes logées à Nottingham; mais ces secours n'ayant pu arriver que le dimanche au soir, on craint que la fureur du peuple n'ait encore eu le temps de faire bien des ravages. Les ouvriers déprédateurs portent des cocardes bleues et sont armés de fusils, de pistolets et de sabres ; ils ont forcé les prisons. Cette émeute est plus effrayante que celle de 1780 (suscitée par George Gordon) et Dieu sait tout le mal qu’il en résultera.
« Suivant les dernières lettres de Birmingham, du 18 (juillet),