Étude sur les idées politiques de Mirabeau
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trative avec l'indépendance des diverses parties du royaume. Chaque fraction territoriale correspondait, selon lui, à un Corps de l’État, Il réclamait l'indépendance de ces corps de l'État, soit des communes, soit des départements. Afin que le royaume ne courût pas le péril de se dissoudre, cette autonomie provinciale et municipale n'allait pas jusqu’à détruire les liens hiérarchiques qui rattachaient entre eux les départements et les communes, et jusqu’à leur permettre de se dérober à l'action du gouvernement.
Ainsi, le projet de Mirabeau tendait à constituer, non pas une confédération de provinces et de villes, mais comme un État féderatif, dont les membres, soustraits à l’omnipotence de la capitale,
jouissent chacun d’une certaine liberté d’action, de manière que la vie politique, aussi bien que la vie intellectuelle et morale, se développät également sur tous les points du territoire et animât chacun des groupes de la nation.
Il savait en effet que toutes les libertés sont solidaires les unes des autres ; que la liberté est un principe applicable à tous les degrés de échelle sociale. De même que les communes sont les familles de l’État qui méritent de jouir de leur indépendance, de même les familles ont des droits qu’il faut respecter pour que ceux des individus soient respectés à leur tour. Cette indépendance si grande que Mirabeau reconnaissait au gouvernement, il l’accordait aussi à la commune et au particulier. Elle devait animer l'ensemble comme les divers membres du corps de la nation. La liberté, tel est l'idéal auquel Mirabeau aspire de toutes les forces de sa conscience. Il revendique pour les citoyens toutes les libertés et tous les droits : le respect de la personne et de la proprièté, la liberté d'industrie et de commerce, la liberté d'émigration, le droit de pétition, la liberté de la presse, l’inviolabilité du secret des lettres, la liberté de l’enseignement, la liberté des cultes, l'affranchissement de la pensée. Donc, guerre aux prohibitions, au monopole, à la censure, à l'intolérance ! Cette liberté donne aux pouvoirs constitués, comme aux citoyens, la plénitude de leurs droits. Les droits des uns ne sont limités qu’autant qu'ils peuvent nuire aux droits d'autrui; mais aucun d'eux ne peut Jamais en annuler un autre. C’est ainsi que les pouvoirs exécutif, législatif, judiciaire et municipal coexistent avec une entière liberté d'allures : ils se contrôlent en ce sens qu'ils s’empêchent mutuellement d’usurper les uns sur les autres, mais de leur action multiple et diverse résulte un effet commun et puissant.