Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

LE COMTE DE VIRIEU 263

corps à corps; ces chocs où les baïonnettes se brisaient dans la poitrine des combattants, sans leur arracher un cri ?..

Si, au lieu d’émigrer, les gentilshommes français eussent pris partout exemple sur le peuple de Lyon, que de défaillances, que de malheurs évités ! Virieu était de cette héroïque défense; il y donna le plus beau des exemples; si l'histoire locale n’a pas conservé le détail de son œuvre, la tradition est formelle : les chefs furent « rous » admirables d'énergie, de courage, de mépris de la mort.

Un jour vint pourtant où il fallut capituler. Plus de poudre, plus de vivres ! L'habitant n’a même plus à se mettre sous la dent la demi-livre d’avoine délayée dans de l’eau, sa seule nourriture depuis deux mois. Mais Précy, mais Virieu, mais tous les gentilshommes qui ont combattu sous leurs ordres ne sont pas de la race des «capitulards ». Ils ne se rendront pas à merci. Précy réunit sa troupe; il lui annonce que le moment est venu de s'échapper ou de tomber dans les mains vengeresses de la.Convention. Gomme si dans la mort la physionomie morale du gentilhomme dauphinois devait une dernière fois revêtir son trait distinctif, sur le coup de minuit, Virieu fait dire exprès pour Jui une messe; il y communie. « La foi du chrétien, dit-il àses compagnons, ne nuit pas au courage du soldat (1). » Au crépuscule, il prend la tête de la phalange,

(1) Ces détails ont été rapportés par M. Forestier, depuis évêque de Troyes, qui avait assisté Virieu.