Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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Il entre et cause un instant ; mais il est clair qu'il entend nous donner l'avantage de sa compagnie et que nous n’aurons pas le plaisir de son absence. C’est absurde!. » Le 30 juin, il quittait Paris. Il n'a donc pas comparu devant le Comité de Constitution. Mme de Flahaut a-t-elle cependant fait parvenir à celui-ci l'exposé qui lui avait été remis et expliqué? Nous 1 ù

n’en savons rien.

Morris a côtoyé les comités des finances, du commerce, diplomatique : mais en cela, sa position était tout autre. Il s'agissait d'intérêts pécuniaires ; les siens ou ceux de son pays. Nous savons que pendant son séjour en France il a toujours cherché à faire des affaires financières ou commerciales et, même en Janvier 1791, quelqu'un lui dit que c’est là la seule objection à sa nomination comme ministre des Etats-Unis en France?. Nous avons vu comment, pour une de ces affaires, il consultait Mme de Flahaut au mois de septembre 1789 sur la composition du comité des finances *.

En février 1791 il s'agissait d'une question grave pour la France, pour les États-Unis et pour Morris lui-même qui, nous le savons, avait des intérêts dans le commerce du tabac. Sous l’ancienne monarchie, d’après le dernier régime en Vigueur, la vente du tabac était monopolisée au profit de l'État et la culture en était interdite en France, sauf dans quelques provinces privilégiées. La ferme générale, qui exploitait le monopole, tirait donc de l'étranger, et particulièrement de l'Amérique, la plus grande partie des tabacs qu’elle vendait. L'Assemblée nationale proclama libres la culture et la vente du tabac; elle frappait en même temps les tabacs étrangers de droits assez lourds, largement abaissés pour ceux qui seraient importés par des navirès français.

Morris averti par son ami Ternant et par le colonel Swan dès le 26 janvier 1791, se remue aussitôt *. On voudrait qu'il demandât à être entendu par le comité de commerce: mais prudemment il s’y refuse, à moins d'y être mandé, comme il se refuse à rendre visite à Montesquiou. La Fayette, à qui natu-

1 D D pnioe =" T. I, p. 395. — 3. Ci-dessus, p. Go. h. Décret des 20-27 mars 1791, Duvergier, [,.p. 167. — 5. T. I, p. 376.