Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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nion sur l'opportunité de dépêcher ce dernier aux chefs des Jacobins. Je leur dis qu'il y a danger d’alarmer ces messieurs. Ces gens-là ont trop de précipitation !. »

Le moment était favorable pour profiter des bonnes dispositions qui s’annonçaient ainsi. On allait procéder à ce qu'on appelait la revision des décrets constitutionnels. Dès le mois de janvier 1790 La Fayette en avait parlé à Morris?. Le 23 sepembre 1790, Chapelier fit voter qu’il serait ajouté au Comité de Constitution sept membres nouveaux pour « concurrement, avec le Comité, examiner tous les décrets rendus par l’Assemblée nationale; séparer ceux qui forment la Constitution proprement dite de ceux qui ne sont que législatifs ou réglementaires, faire en conséquence un corps de lois constitutionnelles, reviser les articles afin de corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser ?. » Les sept membres élus furent Barnave, Clermont Tonnerre, A. de Lameth, Duport, Buzot, Petion et Beaumetz. C'était le triumvirat qui entrait dans la place ; mais en même temps la porte était ouverte aux retouches constitutionnelles ; car, comme le disait Prugnon dans la séance du 16 mai 1791 : « Vous avez formé un Comité-de revision et, en le formant, vous avez nécessairement voulu vous ménager le droit de changer, ou bien le Comité et son travail seraient inutiles *. » Dans les premiers jours de mai 1797, le Journal porte : « Brémond me dit qu'il a pris ses mesures pour être employé à revoir les décrets de l’Assemblée pour dégager de la masse ceux qui formeront la Constitution. J'approuve cela °.» C'est en effet Brémond qui lui apporte le 5 août, définitivement arrèté, le texte de la Constitution f.

Ce repentir partiel et tardif des chefs de la majorité et leur

tentative pour développer, dans le travail de la revision, les

prérogatives de la royauté, sont des faits bien connus. Mais on leur assigne ordinairement une date postérieure. Ainsi Louis Blanc mentionne bien que dans les premiers mois de 4591 Mirabeau et Montmorin « voulaient se ménager le moyen d’influer sur la réprésentation nationale non seulement par

1. T. I, p. 420. — 2. T. I, p. 272, ci-dessus p. 145. 3. Réimpression de l'Ancien Moniteur, &. V, p. 724. 4. Ibidem, t. VIII, p. 410. — 5. T. L, p. 417. — 6. TE, p. 449: