Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

266 : GOUVERNEUR MORRIS

il est probable que beaucoup, qui se taisent par crainte, s’habitueront par degrés à parler favorablement du présent gouvernement, afin de calmer les soupçons et ainsi se dégagera une opinion publique qui, une fois qu'elle s'est prononcée, gouverne la généralité des hommes. Si, par ce moyen, la nouvelle république prend meilleure racine, il ne sera pas facile aux puissances étrangères, je le crois, de la jeter à bas, car la nation française est une masse immense qu'il n’est pas facile de remuer ou de repousser. Vous remarquerez, Monsieur, que les choses sont maintenant ramenées à une question entre la Monarchie absolue et la République, car c’en est fait de tous les moyens termes !. »

Le 22 septembre (après les massacres) 1l écrit à Washington : « Ils sont maintenant fous de leur République et peutêtre adopteront-ils par acclamation quelque forme de gouvernement ; mais qu'ils adoptent une bonne forme et que l'ayant adoptée, ils sachent s'y maintenir, c'est ce que je ne crois point (toujours la foi aristocratique !). L'avenir est donc enveloppé dans le brouillard et dans l'obscurité. Il n'ya qu'un souverain en Europe — l’impératrice de Russie — qui ne soit pas, dans la balance des talents! considérablement audessous du pair ?. » Le 23 octobre 1792, il parle, dans une lettre à Jefferson « de la République, dont le peuple s’est trouvé en possession par une sorte de magie ou par un tour de passe-passe et dont pourtant il est aussi entiché que si c'était son propre rejeton ? ». Et plus loin : « En ce qui concerne la disposition présente du peuple de ce pays, mon opinion bien nette est que la majorité réelle est maintenant pour la République. Quelles seront la disposition et l'opinion dans six mois d'ici, c'est ce qu'aucun homme raisonnable ne pourrait, je le crois, prendre sur lui de déclarer, encore moins être fixé sur la forme de gouvernement que présentera la Convention. Si elle est vigoureuse, il est très problématique qu'elle soit acceptée par les départements à moins qu'ils ny soient forcés par le sentiment et la menace du mal extérieur ; si elle est faible, il est impossible (humainement parlant)

ED, pe 5735" TT, p: 091. — 3. T.I, p. 506.

; -