Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

DEPUIS LA MORT DE MAZARIN JUSQU'A L'ÉDIT DE TOLÉRANGE (O1

pays des blessures par lesquelles s’écoula une grande partie de nos richesses.

Si, du moins, le « fils aîné de l'Église » avait réussi dans son projet d'unification, mais, quelque puissant qu'il fût, il n'avait pas même pu ramener au giron de sa mère tous ses sujets, il avait dû souffrir des exceptions. Par exemple en Alsace et au pays de Montbéliard, il avait été obligé de tolérer le culte de la confession d’Augsbourg, en vertu des traités de Westphalie. Il est vrai qu'il exécutait les clauses des traités concernant la religion, aussi judaïquement que possible et qu'il favorisa par tous les moyens l'immigration des catholiques sur les terres abandonnées en Haute et Basse-Alsace”. Il y avait, outre ces protestants des pays annexés, des colonies juives en Alsace, à Metz, à Bordeaux et à Bayonne; sans compter les Israélites du Comtat-Venaissin, qui de tout temps avaient été protégés par les Papes dont ils étaient les sujets. Ces Juifs jouissant d'anciens privilèges, bien placés et très habiles au commerce extérieur, étaient dans un état prospère, qui les faisait croître et se multiplier.

Quant au restant des sujets calvinistes du Roï, il s’en fallait de beaucoup, contrairement à ce que lui avaient assuré des évêques ou des intendants plus zélés que sincères, qu'ils fussent tous réellement convertis au catholicisme. Les nouveau-converlis, au nombre d’un million environ, n'étaient catholiques que de nom. Ils n’allaient à la messe et n’envoyaient leurs enfants au catéchisme du curé qu'à contre-cœur et gardaient au fond de l’âme un attachement invincible à la foi de leurs pères ; dans l'intimité du foyer domestique, ils continuaient à lire la Bible, à prier et à chanter les psaumes en français. «Il y a, écrit Lamoignon de Baville, intendant du Languedoc, « des contrées de vingt à trente paroisses, où quelque soin

« qu'on se soit donné pour y parvenir on n’a pas réussi à faire « un seul catholique, ni même à en établir un seul du

« dehors... Les nouveau-convertis qui ont cédé à la violence

1. Déclaration royale de novembre 1682.