Histoire de la théophilanthropie : étude historique et critique : suivi d'une notice sur les catholiques allemands
86 HISTOIRE
Tout rapport vivant étant ainsi supprimé entre Dieu et l'homme, que peut être dès lors la religion, qu'une froide, vaine et vague adoration ?
La morale elle-même se ressent de cet isolement dans lequel l'homme se trouve placé vis-à-vis de Dieu. Séparé de Dieu, en effet, l'homme est réduit à tirer tout de lui-même; qu'est-ce à dire, sinon que sa foi diminue et que son idéal s’abaisse nécessairement ?
Ce quela Théophilanthropie méconnaitencore (et c’est une autre raison de sa pauvreté religieuse) c’est la présence et l’action permapente de Dieu dans l’histoire. Il ne peut échapper que c'est une conséquence de l'idée déiste : pour le Déisme, Dieu n'étant ni dans la nature, ni dans la conscience, ne saurait être dans l’histoire, dans Y’histoire qui n’est, après tout, que le développement de la conscience de l'humanité. De là, dans la prédication théophilanthropique, une absence complète de vues sur le développement historique, religieux et moral de l'humanité. L'idée si vraie, si large et si féconde, d’un développement religieux progressif, dont Pétat de nature aurait été le point de départ, dont chaque religion, se: lon son degré de pureté et de lumière, représenterait un degré plus où moins élevé, et dont le dernier terme serait le christianisme, dans ce sens au moins que le christianisme renferme en luismême le germe de tous les développements à venir, cette idée, dis-je, leur manque absolument. Le sentiment historique à fait compiétement défaut aux fondateurs de la Théophilanthropie. Chose étrange et qu’on s'explique difficilement ! A cette notion moderne et vraie d’un développement humain, continu, progressif, ils ont préféré, ce semble, ceile d’une religion primitive, parfaite, que les premiers hommes auraient possédée et pratiquée, qui se serait perdue ensuite et que la Théophilanthropie aurait enfin retrouvée. On a peine à s’expliquer cette idée, dans un sysième qui repousse toute révélation : faut-il voir là une conséquence du principe de Rousseau : « L'homme naît bon, la société le déprave. » Il est permis de le penser.
Quoi qu’il en soit, la Théophilanthropie ne voyant Dieu, ni dans la conscience individuelle, ni dans l'histoire, on conçoit combien Je domaine religieux se rétrécit pour elle. La grandeur et Ja sa-