Histoire des deux conspirations du général Malet

DU GÉNÉRAL MALE 123

Bonaparte serait loin, bien loin, à huit cents lieues de nos frontières, et il serait facile à un homme résolu d'entreprendre, avec de grandes chances de succès, la destruction du gouvernement impérial. Nous verrons tout à l’heure avec quelle merveilleuse perspicacité le général sut tirer parti des circonstances, et avec quel génie véritable il prépara ses moyens d'action.

Mais, avant de raconter l’événement dans lequel il trouva une gloire impérissable et la mort, il faut dire quels étaient la situation de notre pays et l’état des esprits en France.

L’empire s’était encore accru depuis 1808. Napoléon avait écrasé l’Autriche, et l’on avait vu le descendant des empereurs d'Allemagne offrir sa fille, une archiduchesse, à ce fils ingrat de la Révolution, àce parvenu de Brumaire, à cet aventurier couronné, qui avait trempé sa pourpre dans le sang d’un prince de race royale. Mais cet empire s’affaiblissait par son accroissement même. Et, quand même! ce qu’il gagnait, en apparence, en force matérielle, il le perdait en force morale. Ce n'étaient plus seulement les rois qu’il avait contre lui, c’étaient les peuples, et son chef était seul responsable des malheurs du monde. L’Espagne semblait être pour lui le commencement du châtiment. Nous y marchionsde désastres