Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

352 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

« L'ex-ministre Montmorin a été percé de coups entre les jambes d'un député, il méritait mille morts. C’est lui qui a refusé l'alliance offerte par la Prusse, qui n'a nullement parlé à l'Assemblée des bonnes dispositions de cette puissance à notre égard, et qui nous a enfin attiré Les Prussiens sur les bras.

« Le peuple, dans les premiers moments de sa fureur, s'est porté au Temple, mais M. Pétion est parvenu à le calmer un peu. On craint toujours cependant pour la vie du traître Louis XVI.

« Des nouvelles plus propices arrivent dans ce moment-ci des armées. On a annoncé à l’Assemblée Nationale que les Prussiens ont levé le siège de Verdun et ont rétrogradé sur Longwy. La ville a soutenu deux assauts et un bombardement de douze heures.

« Les armées de Dumouriez et de Kellermann vont bientôt se réunir. Le soldat montre une ardeur incroyable. Nos troupes s'avancent sur l'ennemi de concert, en bon ordre et avec l’impatience d'en venir aux mains. Le camp de Soissons s'est aussi ébranlé. Les campagnes vomissent des soldats ; la terre semble les produire ; trois cent mille hommes s’arment dans la campagne.

« P.-S. — La nouvelle de la levée du siège de Verdun convint de retarder le départ jusqu'à ce qu'on se fût procuré un nouveau passe-port, et, dans la soirée, Sinteil, qu'ils faisaient passer pour leur domestique, monta en voiture avec eux, et

s’éloigna enfin de cette malheureuse ville, où il avait vu la mort de si près. »