La caricature anglaise au temps de la Révolution française et de Napoléon

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se tenir de le ridiculiser dans son rôle de grand-père, nourrissant à la becquée l’héritière de ses couronnes.

Donc, point d’illusion loyaliste; même, à l'égard du grand ministre et de l’honnète ménage royal, quelque injustice. Peu importe; l'opinion des dessinateurs et de leur public n’est pas douteuse: elle est grincheuse, mais conservatrice.

Il

La guerre avait commencé, la plus terrible et la plus dangereuse que l'Angleterre eût jamais faite. La caricature, que nous venons de voir si nettement hostile à la France révolutionnaire, hésite pourtant, pendant les premières années, à se déterminer dans le sens belliqueux. Elle est surtout préoccupée, comme l'opinion publique telle que nous la connaissons par les autres témoignages, de l'énormité des dépenses que la guerre entraîne. Là-dessus, la verve de Gillray se déchaîne, endiablée. John Bull est engagé dans un moulin à café où il s'enfonce, se raccourcit, va disparaitre: c’est que la substance de John Bull s'en va en guinées, et William Pitt tourne le moulin. Il a besoin de cet or monnayé qui ruisselle, tant il lui en faut pour payer l'empereur et les rois coalisés. Ailleurs, tous ces personnages couronnés sont là qui tendent la main, et Pitt leur donne des guinées, leur en donne encore; il paraît que John Bull n'a pas disparu tant que cela dans le moulin, car il ressuscite en ce second dessin pour que le ministre financier puise dans ses poches. En un troisième, tandis que le peuple au dehors crie famine, Pitt et ses collègues sont attablés : ils mangent un énorme poisson, un énorme rosbif; et -ce pois son, ce rosbif, ce sont encore des masses de gui-