"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

LES ILLYRIENS AVANT « LA GUZLA ».

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effrayantes et vaguement horribles » et les « malaises causés par les visions nocturnes », dont est remplie sa Jettatura 1 . La ressemblance des sujets n’est pas accidentelle; en effet, à la page 89 de l’édition originale (Hetzel, 1887, in-16), Gautier parle du smarra qui, « offusqué, s’enfuit en agitant ses ailes membraneuses, lorsque le jour tire ses flèches dans la chambre, par l’interstice des rideaux». Pour prouver encore avec plus d’évidence que Nodier fut le guide de V. Hugo et de Gautier dans ces régions d’épouvante, disons que ce mot de smarra, employé par ces derniers, ne figure dans aucun dictionnaire, pas même dans celui de Nodier. Par conséquent, ce vocable prétendu esclavon ne put être emprunté qu’au « comte Maxime Odin ». Comme nous avons eu occasion de le dire au cours de ce chapitre, cette « bizarre interprétation des bizarreries du cauchemar » n’a rien de commun avec les croyances illyriennes ; elle ne fut pas composée en Illyrie et si le volume qui la contient ne renfermait pas d’autres poèmes, nous n’en parlerions que pour signaler la fausseté de cet état civil auquel on fait toujours crédit 2 .

1 Gf. ci-dessous, ch. vi, § 3. 2 Notons encore une œuvre inspirée par la nouvelle de Nodier : Smarra ou le démon des mauvais rêves, divertissement arrangé par MM. Valnay et Adrien pour les représentations de John Devant (au Théâtre de Drury Lane à Londres) qui remplit les rôles de Yakoff et de Smarra. La scène est en Finlande. Paris, typ. de M“’ veuve Dondey-Dupré, rue Saint-Louis, 46, s. d. [1853], Bibliographie de la France du 12 mars 1853. En 1840, Smarra fut traduit en espagnol. Voici le titre de cette traduction : Smarra, à los demonios de la noche. Sueno romântico, tradueido del esclavon al francés por Carlos Nodier, y del francés al espanol por A. M. Barcelona, 1840, imp. de T. Taulô, ed. Madrid,lib. de Cuesta. En 16°. Con Jâms. (Don Dionisio Hidalgo, Bibliografta espanola, Madrid, 1870, t. IV. p. 502.)