"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

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CHAPITRE 11.

chansons puisées dans la tradition orale 1 ; FrançoisAuguste de Moncrif, qui fit quelques complaintes sur les thèmes populaires a ; et surtout l’infatigable Restif de La Bretonne, qui cita mainte chanson bourguignonne dans ses étranges romans. Mais c’étaient là des amateurs d’occasion, et leurs sympathies pour la poésie populaire n’étaient pas assez réfléchies pour constituer un programme littéraire. Moins nombreux et quelque peu attardés furent ceux qui pensèrent à tirer des effets artistiques de la simple et vieille ballade du peuple. C’est à peine si l’influence anglaise, en Allemagne si bienfaisante, se fît sentir en France au xvni e siècle ; Percy y fut presque inconnu jusqu’en 1806, aussi les rares tentatives pour transplanter dans ce pays le goût de la ballade populaire demeurèrent-elles toujours sans succès. Ossian fut plus heureux que Percy. Dès le mois de septembre 1760, le Journal étranger publiait les «fragments d’anciennes poésies, traduits en anglais de la langue erse, que parlent les montagnards d’Écosse 3 ». | En 1762 en parut la première traduction française imprimée séparément : Garthon. Le culte de « l’Homère celtique » était entièrement établi quand Letourneur donna sa traduction des « poésies galliques d'Ossian, fils de Fingal» (1778), traduction qui eut un succès prodigieux ; il ne sera pas affaibli vingt ans plus tard, quand paraîtra celle de Baour-Lormiam

1 Prunelles ou Petits airs tendres, avec les doubles et la basse continue, méslées de chansons à danser, 3 vol. Paris, 1703, 1704, 1711. Les Bondes, chansons à danser, Paris, 1724. 2 Les constantes Amours d’Alix et d’Alexis et les infortunes inouïes de la très belle, honnête et renommée comtesse de Saulx. (Œuvres de Uoncrif, Paris, 1769, tome III.) 3 Joseph Texte, op. cit., p. 389.