"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

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CHAPITRE 11.

miers modèles. Toutes mes impressions, disait-elle, toutes mes idées me portent de préférence vers la littérature du Nord ». Nous n’insisterons pas sur l’importance de ces lignes. Disons seulement que l’impérial ennemi de M me de Staël, lui aussi, admirait le barde écossais; il en porta avec lui la traduction italienne de Cesarotti et la lisait entre deux batailles comme Alexandre lisait son Homère. Jusque dans ses proclamations, Napoléon imitait la prose rythmée de Macpherson 1 . Il y eut en France toute une génération de Malvina, d’Oscar et de Selma. Sous le Directoire, on voyait dans les nuits froides et orageuses, au milieu du Bois de Boulogne, des hommes demi-nus, assis autour de feux druidiques 2 . En 1804, Charles Nodier composait les Essais d’un jeune barcle. En 1808, Lamartine chantait : Toi qui chantais l’amour et les héros, Toi, d’Ossian la compagne assidue, Harpe plaintive, en ce triste repos. Ne reste pas plus longtemps suspendue 3 . En 1818, Victor Hugo envoyait aux Jeux floraux de Toulouse un poème ossianique, les Derniers Bardes. Une année plus tard, Balzac, âgé de dix-neuf ans, composant son Cromwell, écrivait à l’une de ses sœurs : « Tiens, ce qui m’embarrasse le plus, ce sont celles [les situations] de la scène première entre le roi et la reine. Il doit y régner un ton si mélancolique, si touchant, si tendre, des pensées si pures, si fraîches, que je désespère! Il faut que cela soit sublime tout du

1 Thomas S. Perry, EnglishrLiteralurein the Eighteenth Century, New-York, 1883, p. 417, - J. Texte, op. oit., p. 400. s Lettre à AI. de Virieu. Gf. aussi : Cours familier de littérature, tome XXV.