"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

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CHAPITRE 11.

Le premier qui ait subi en France l’influence des collectionneurs de ballades anglais, paraît avoir été P.-A. de La Place (1707-1793), écrivain médiocre qui avait appris l’anglais au collège de Saint-Omer et débuté par uneinsignifiante traduction delà Venise sauvée d’Otway. En 1773, dans ses Œuvres mêlées, il avait « rajeuni » le langage de quelques « romances historiques » en vers : Léonore d'Argel. Frédégonde et Landri, le Chevalier et la fille du berger' 1 -. Dans son recueil des Pièces intéressantes et peu connues (Bruxelles, 1784-1788), il donna toute une série d’anciennes romances et contes qui témoignent une certaine connaissance des recueils anglais qu’il avait voulu imiter. C’est ainsi que, dans une note, il reconnaît avoir emprunté à « un historien anglais » laÆosamontZe, romance galante et tragique, l'une des plus connues des Reliques de. Percy 3 . D’ailleurs, il précisa ses intentions dans une intéressante introduction : Pourquoi, dit-il, avons-nous si peu ou, pour mieux dire, presque pas, de ces anciennes romances historiques, tragiques ou intéressantes, à quelques égards que ce soit, tandis que les Espagnols, les Anglais, les Allemands, etc., en ont des recueils qui se font toujours lire avec d’autant plus de plaisir, qu’en rappelant plus ou moins bien à la mémoire des événements faits pour occuper ou le cœur ou l’esprit, elles opt de plus le mérite de peindre les mœurs anciennes, toujours faites, soit pour nous amuser, soit pour nous instruire agréablement ? Le prodigieux succès de la romance de Marlborough pourrait seul en donner la preuve, si l’empressement avec lequel-nous nous hâtons de transporter les romances étrangères dans notrelangue était aujourd'hui moins connu.

1 Lettres diverses et autres œuvres mêlées, tant en prose qu'en vers, Bruxelles, 1773, 3 vol. in-12, t. I, pp. 118, 162 et 199. 2 Reliques, Second Sériés, Book the2nd, n" 7. (T. 11, p. 19 de l’édition J. M. Dent and G”.) John Stow, A Summary of the Chronicles of England from the ftrst coming of Brute into the Landunto this présent Lear, Londres, 1565. Souvent réédité et continué jusqu’à l’an 1611.