"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

LA BALLADE POPULAIRE AVANT « LA GUZLA ».

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de rapprocher de ces chansons les légendes et les contes en prose, dont Vouk Kàradjitch donna également un recueil 1 . Avec la seconde période, nous entrons dans le domaine de l’histoire; on range dans cette catégorie les piësmas relatives aux anciens rois serbes, à la dynastie des Némagnas. Nous n’en connaissons qu’un assez petit nombre, mais elles ont été, sans doute, autrefois beaucoup plus répandues; puis sont survenus des événements qui ont plus vivement frappé l’imagination populaire et les ont fait en grande partie oublier. Le troisième cycle, le plus important de tous, renferme les chansons qu’ont inspirées les luttes des chrétiens et des Turcs, la.bataille de Kossovo (1389), les exploits de Marko Kraliévitch, des heyduques et des uscoques 2 . C’est là qu’est le centre de l’épopée nationale. La gloire de Marko 3 a dépassé les frontières de la Serbie; il est devenu le héros national des Bulgares, et, depuis des siècles, les SerbtnCroates du littoral adriatique, les Croates et même les Slovènes connaissent et célèbrenfses exploits. Ce développement de l’épopée s’explique tout naturellement par l’importance même des événements : la lutte séculaire avec les Turcs, en réclamant toutes les forces nationales, a perpétué les

1 Traduction allemande, avec une préface de Jakob Grimm, Berlin, 1854. 3 Adolphe d’Avril, La Bataille de Kossovo, rhapsodie serbe tirée des chants populaires et traduite en français, Paris, 1868. Un professeur serbe, M. Sréta Y. Stoïkovitch, a fait tout récemment un nouvel essai, très_r£ussi, pour fondre en un seul poème les nombreux fragments de cette épopée. 3 John Oxenford, Marko Kralievitch, t/ie llylhical Bero of Servia, dans le Macmillan’s Magazine, janvier 1877, pp. 222-229 ; V. Jagic, dans l’Arcftw fur slavische Philologie, t. V; Auguste Dozon, op. oit. ; Louis Léger, Le Cycle épique de Marko Kralievitch, dans le Journal des Savants, novembre-décembre 1905.