"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

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CHAPITRE VI.

en France, et Louis XV s’adressa à son ambassadeur à Vienne, le duc de Richelieu, pour avoir des détails i . En Allemagne, on publia une foule de dissertations écrites d’après les points de vue les plus différents; théologiens, philosophes, chirurgiens, historiens crurent devoir dire leur mot là-dessus: les uns, ne croyant pas, mais essayant d’expliquer la superstition par les raisons les plus étranges, les autres, prenant la chose au sérieux et se demandant si c’était le corpus, l’anima ou le spiritus qui faisait agir les vampires 2. En France, Boyer d’Argens, d’abord, « ce d’Argens, comme l’a dit Voltaire 3 , que les jésuites, auteurs du Journal de Trévoux, ont accusé de ne rien croire », raconta le plus sérieusement du monde des histoires de vampires dans ses Lettres juives qui sont, on le sait, une des nombreuses imitations des Lettres persanes. Nous ne savons si nous nous abusons, mais il nous paraît que ce fut lui qui introduisit le mot serbe dans la langue française (1737) 4 . Après lui, un érudit célèbre, le R. P. dom Augustin Calmet, l’historien de la Lorraine et le commentateur de la Bible, publia en 174-6 ses Dissertations sur les apparitions des anges, des démons et des esprits, et sur les revenants et les vampires s , livre absurde « dont on n’aurait pas cru son auteur capable 6 ». Voici les conclusions auxquelles il arrive :

1 Histoire des Vampires, Paris, 1820, p. 243. 2 Voir la liste de ces ouvrages chez M. Hock, pp. 36-48. 3 Dictionnaire philosophique, article: « vampires ». 4 Le Dictionnaire d’Hatzfeld et Darmesteter ne connaît pas d’exemple avant 1762. 5 A Paris, chez de Bure aîné, 1746, pp. 500 în-12. Les éditions postérieures sont en deux volumes. 6 Diderot et d’Alembert, ['Encyclopédie, article : « vampires. » Pourtant, il faut le reconnaître, l’ouvrage du père Galmet a toujours