La patrie Serbe

8 LA PATRIE SERBE

Ainsi qu'il est dit plus haut, le sort de la malheureuse Serbie fut, parmi tous les sorts effroyables, le pire. La Belgique gémissant sous la cravache prussienne, la Roumanie proie rapidement saisie, nos départements du Nord, écrasés par la force du vainqueur,ne sont pas descendus dans le gouffre de désespoir au fond duquel sombra l’ancien empire de Némania. À peine secourue par ceux de ses alliés incapables de produire un plus grand effort, coupablement abandonnée par ceux qui auraient pu mieux l'aider, ignoblement trahie par d'anciens amis, la Serbie râla son agonie torturée. Tandis qu’une partie dela nation attendait la mort parmi ses champs el ses vergers, la partie la plus forte se mêla à l’armée et tenta de fuir vers un salut espéré. Un salut promis par ceux qui n'avaient pas soutenu les vaillañts soldats serbes. Le salut promis ne vint pas, où plutôt il vint trop tard pour empêcher des milliers et des milliers de Serbes de glisser exténués vers la mort, leur dernier asile, la mort pitoyable, seul refuge de leurs douleurs. Lexode à travers les neiges albanaises fut abominable, et la longue angoisse de semaines subies sur la plage de l’Adrialique si proche de l'Italie féconde, de la Grèce riante, est impossible à retracer. Trahis, les Serbes, s'ils avaienteu moins de noblesse d'âme, auraient pu faire la paix, mais ils refusèrent de déshonorer leur parole et conli-

nuèrent de mourir.