La première Commune révolutionnaire de Paris et les Assemblées nationales

48 LA PREMIÈRE COMMUNE RÉVOLUTIONNAIRE DE PARIS

l’Assemblée législative ne consentirait pas à lui livrer les prévenus d'Orléans, avait pris une résolution singulièrement hardie, ce qui veut dire ici hardiment illégale : elle avait décidé de forcer la volonté de l’Assemblée par la préhension brutale des prévenus en question. Elle avait fait partir pour Orléans une troupe armée de cinq ou six cents hommes: ceux-ci devaient prétendre « s’être levés d'eux-mêmes, afin d'aller à Orléans empêcher que les royalistes ne délivrassent les prévenus, car tout le monde savait qu'un complot était formé dans ce but ». — L’orateur de la Commune, ce jour du 26 août, ne fait donc que débiter à l'Assemblée un prétexte convenu à la Commune. — Il ajoute qu'à la nouvelle du décret Gensonné, cette troupe volontaire de patriotes zélés s’est arrêtée pour attendre la suite des décisions de l’Assemblée nationale. Ce qui avait arrêté la marche de la petite armée révolutionnaire, c'était en réalité un ordre de la Commune elle-même. La commission extraordinaire de la Législative, apprenant la singulière expédition, entre le 24 et le 26 août, avait demandé à la Municipalité une explication catégorique. La Commune, un peu intimidée, avait imposé un sursis à sa bande; puis avait envoyé cette députation-ci donner à l’Assemblée l'explication sournoise que nous venons d'entendre.

L'Assemblée prit un parti qu’elle crut habile : elle imagina de s'emparer de l'expédition et de la conduire selon ses volontés; elle décréta, ce jour du 26, l'envoi à Orléans d’une troupe, légale cette fois, pour veiller à la garde des prisonniers. Elle pensa déjouer ainsi les projets de la Commune. Ce fut l’Assemblée qui fut jouée. Elle fut jouée, grâce à la naïveté admirable de son ministre Roland. Il appartenait à celui-ci de choisir l'homme qui commanderait à la fois la troupe de l'Assemblée et la troupe subordonnée de la Commune. Roland alla choisir tout juste pour chef de ce rassemblement l'homme que la Commune avait préposé à son expédition à elle, Fournier, dit l'Américain. Cette extraordinaire bévue s'explique, si l'on en croit Mortimer Ternaux, par l'as-