La Révolution française et ses détracteurs d'aujourd'hui

LA RÉVOLUTION ET LA QUESTION SOCIALE 95

homme né sot ou méchant hérite de moyens qui rendront sa bétise ou sa méchanceté plus malfaisantes ? Est-il juste qu'il y ait, par le fait des lois, des riches de naissance, des pauvres de naissance ? Et l’article 9, en établissant le droit à la propriété, ne disait pas que les propriétés seraient inégalement réparties. On a tort d'opposer au socialisme les principes de 1789. C'est toujours cette erreur qui consiste à confondre la Déclaration des Droits de 1789 avec la Constitution monarchique et bourgeoise de 1789. Oui, le socialisme est en contradiction avec le système social établi en 1789, mais il est la conséquence logique, extrême, dangereuse, si l'on veut, des principes de 1789, dont se réclamait Babeuf, le théoricien des égaux (1).

Et si l’on objecte à cette thèse qu'avant Babeuf, précisément, presque personne ne s’avisa de cette conséquence logique, la réponse est facile :

Une première révolution économique et sociale s'était opérée ou allait s'opérer par la destruction de la propriété féodale, par l'abolition du droit d’aînesse, par la vente des biens nationaux, par une moins injuste constitution et répartition de la propriété. L’ensemble des Français furent satisfaits de cette révolution, et ne virent pas au delà, parce que les plus criantes de leurs souffrances venaient d'être calmées.

C'est quand d’autres souffrances, issues de l’ordre de choses nouveau, se firent sentir, que l'on demanda à tirer les conséquences complètes de la Déclaration des Droits. Et comme ce fut une minorité qui souffrait réellement, ouvriers des villes réduits à la misère par les conditions économiques qu'avait amenées la prolongation de la guerre, ce fut une minorité qui ré-

(1) Pp. 46-48.