La Révolution française et ses détracteurs d'aujourd'hui

LA RÉVOLUTION ET LA QUESTION SOCIALE 81

nuit du 4 août, si admirable qu'elle soit par l’enthousiasme des sacrifices, étonne moins, quand on ne la détache point de sa cause immédiate, cette jacquerie, dont elle consacra le succès. Ce ne fut en somme qu’un délire de ratification. Le régime féodal, que l’Assemblée abolissait parmi des larmes de joie et de frénétiques embrassements, le paysan avait commencé par l’anéantir, afin de pouvoir vraiment vivre sur sa terre affranchie.

Il avait fait sa révolution tout seul, entrainé, il est vrai, soulevé par le mouvement bourgeois et par la victoire du Paris populaire. Et l'avènement de la propriété individuelle, de cette propriété sans privilèges ni servitudes, qui fut si chère à la Révolution qu’elle la défendit même par la terreur, a done été l'œuvre, en définitive, du Tiers- État entier.

Je ne l'ignore pas : avant 1789, il y avait déjà des paysans pleinement propriétaires; mais, dit M. Edme Champion, « même pleine et entière, la propriété comportait en bien des cas des restrictions qui l’altéraient gravement. Les pays de franc-alleu, en dépit de leur titre et de leur réputation, n'étaient pas exempts des servitudes féodales. Un de ces pays, la Soule, se trouvait assujetti par sa coutume à des droits désignés sous le nom significatif de nouveaux fiefs. (1) »

Puis, et surtout, cette propriété pleine ou pré-

(1) Histoire générale, publiée sous la direction de MM. Lavisse et Rambaud, t. VIII, p. 19. 5.