La Serbie

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Im Année. — No 34

RÉDACTION et ADMINISTRATION @, rue du XXXI Décembre - Genève æ Téléphone 14.05 #

La campagne de

… La revue britannique « The New Europe » vient de déchaîner une campagne incompréhensible contre le gouvernement actuel du Royaume de Serbie. Dans deux de ses derniers numéros, des 22 et 29 août, elle ‘n’a pas publié moins de trois articles véhéments contre M. Pachitch et son ministère, composé, actuellement, uniquement des membres du parti radical. Deux de ces articles émanent de la rédaction même de la «New Europe », tandis que le troisième est signé par «un groupe de Serbes » qui n’ont pas voulu donner leurs noms, mais que la « New Europe » à couvert par son assurance formelle qu’il s’agit de personnages «inspirant du respect et de la conliance ». | Nous ne voulons pas entrer dans l’examen des questions d'ordre intérieur soulevées par: la « New Europe », notre journal étant consacré uniquement et entièrement à la défense de l'indépendance et. de la liberté des Serbo-Croates et Slovènes et à la réalisation de IA mission nationale de la Serbie. DURE 7 La seule chose que nous tenons pourtant à constater, à propos des critiques et des menaces de la « New Europe », pour autant qu'elles concernent les affaires intérieures serbes, c'est qu'heureusement l'organisme étatique de la Serbie est resté intact, malgré l'occupation du pays, et que, par conséquent, toutes les questions intérieures contestées et disputées, si difficiles qu’elles soient, peuvent trouver leur solution dans les formes prévues par les lois et la constitution serbes. L'appel lancé par la « New Europe » en faveur d'une ingérence des Alliés dans les aliaires intérieures serbes est donc plus que déplacé et il ne sera sûrement suivi nulle part. Les démocraties occidentales n’ont pas l'habitude de toucher à l'indépendance extérieure et intérieure de leurs alliés petits et grands. Il appartient donc aux trois facteurs constitutionnels de la Serbie, le roi (Prince-Régent), le gouvernement et le parlement, de déterminer la politique serbe et c’est à eux de trouver par les moyens constitutionnels et dans les formes prévues par les usages du parlementarisme, des solutions pour toute question controversée. La rédaction de la « New Europe » n’aurait pas dû perdre de vue que la Serbie est un Etat indépendant qui n’admet pas l’ingérence étrangère dans ses propres affaires. Si la « New Europe » se fait une autre idée de la Serbie, elle se trompe grossièrement.

. Mais si nous ne parlons pas des criliques de la « New Europe » concernant les questions d'ordre intérieur, nous ne pouvons passer sous silence l’autre parlie des articles de la « New Europe » qui à trait à la politique. extérieure de la Serbie. C'est là que réside l'essence de toute la campagne de la « New Europe » et c’est ce qui nous oblige à faire. les réserves les plus formelles au sujet des affirmations plutôt gratuites contenues dans ces articles. Deux de ces affirmations sont des plus grotesques : la première se rapporte à un prétendu «choix» devant lequel la Serbie se trouve placée par suite de sa politique, et la seconde a trait à l'application du manifeste de Corfou. Or, la Serbie n’a rien à choisir et elle n’a non plus jamais tergiversé dans sa politi-

-que nationale. Depuis le premier coup de canon, en 14914, la Serbie à proclamé son programme national et c'est à ce programme qu'elle à sacrifié plus d’an quart de sa population, La Serbie lutte pour la délivrance de ses frères serbes, elle lutte aussi

_ pour la délivrance des Croales et Slovènes,

_et tous ses eflorts sont tendus vers ce but élevé : réunir tous les Serbes, Croates et

.Slovènes. dans un royaume indépendant

_ serbo-croate et slovène, libre de toute domination et de toute influence étrangère. La Serbie remplit fidèlement la mission qui lui est confiée par le destin lui-même et elle a préféré accepter la lutte inégale aveé une grande puissance que de se plier devant l’ordre de Vienne de renoncer à son

la «New Europe

Prix du Numéro

: 10 Cenfimes

Paraissant tous les Samedis Rédacteur en chef : D: Lazare MarCOVITCH, professeur à l'Université de Belgrade

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indépendance et à toute velléité d’une union avec ses frères d’Autriche-Hongrie. L’article de la « New Europe » est un égarement déplorable, un geste contraire aux réalitôs historiques et nationales, un coup d'épégl dans l'eau. La politique de la Serbie n'est pas à faire, elle existe depuis longtemps, ciaire, précise, pleine d'abnégation et de sacrilice mais resplendissante de foi et de coufiance dans la victoire du droit et de ta Justice. Les tombeaux glorieux d’un million de Serbes ont bien marqué la trace de la politique serbe, et il faut être aveugle pour

pouvoir parler aujourd'hui d’un « choix » !!

La « New Europe » reproche en outre au gouvernement de Serbie de ne pas pràtiquer la politique de la Déclaration de Corlou mais de viser plutôt des buts égoistes et étroits. Et les preuves ? La « New Europe « ne les tournit pas, pour la raison trés simple que ces preuves n'existent pas. La Serbie est bien consciente de son devoir envers les Serbo-Croates et Slovènes et elle serait indigne des victimes tombées, si elle suivait le conseil de la « New Europe» d'immerger, avant l’accomplissement de sa mission historique, le Piémont martyre dans l'Italie inachevée. ES

Quant à l’article signé par «un groupe de Serbes » il contient des choses que l'on n’est pas habitué à voir exprimées par des Serbes. Les signataires de cet article s'adressent en effet aux gouvernements alliés en leur demandant d intervenir dans les affaires intérieures serbes et de prendre position en faveur des partis d’opposition et contre le gouvernement actuel.

. Pour:excuser -une telle démarche insolite,

ils déclarent « qu’en temps normal l’opposition aurait recommandé au peuple de ne pas payer les impôts et qu’elle aurait forcé le gouvernement de faire appel aux électeurs. Dans les circonstances actuelles, elle ne peut que s'adresser aux gouvernements alliés ». Or, cette manière de voir est plus que surprenante. Dans d’autres pays alliés, il existe aussi une opposition, même une opposition qui n’approuve même pas la politique générale suivie par les gouvernements et pourtant personne dans ces pays n’a eu l’idée de combattre le gouvernement par des moyens aussi bizarres que ceux-ci employés par le «groupe des Serbes» que patronne la « New Europe ».

Ce quiestle plus déplorable, c’est la déclaration imprudente et faite à la légère de ces Serbes anonymes, disant « qu'’aujourd’hui il n'existe pas de Serbe ou Yougoslave qui ne considérerait pas que notre devoir moral et notre intérêt national nous commandent de rester jusqu'au bout avec les Alliés, mais si le gouvernement actuel continue à garder le pouvoir, personne ne peut garantir l’avenir ».

Comment la rédaction de la « New Europe » qui assure qu’elle professe pour la Serbie et le peuple serbe «la plus grande admiration et la plus profonde estime » comment a-t-elle pu hospitaliser des lignes si peu dignes de n'importe quel Serbe ! Si dans l'égarement des luttes de partis, il s’est trouvé des politiciens échauffés pour écrire de telles maladresses, la « New Europe en amie sincère de la Serbie, aurait dû empêcher la publication de paroles intempestives qu'erronées. Malgré les dilférences de parti tous les Serbes seront unanimes à désapprouver la déclaration citée qui est contraire à notre idéal national, à tout le passé politique serbe et à l'esprit admirable de sacrifice dont la Serbie a donné tant de preuves brillantes au cours de la guerre actuelle. Et la moralité politique aurait exigé que les auteurs anonymes de l’article en question signent de leur noms une manifestation qui est en Contraste flagrant avec les déclarations formelles des chefs mêmes d’oppositions faites au Parlement et hors de Parlement. (Voir

le discours du député Drachkovitch dans la

Skoupchtina publié par «La Serbie» du 18 mai et la lettre du député Marincovitch dans le «Times » du 5 août). LM

JOURNAL POLITIQUE HEBDOMADAIRE

. Genève, Samedi 14 Septembre 1918.

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Comment les Magyars se figurent la démocrati

La «Revue de Hongrie» du 15 juillet - 15 août 1918 parlant de la démocratie en Allemagne, la caractérise en ces lermes :

«À notre avis, en mettant à part la Russie,

c'est en Allemagne qu’est le foyer le plus vivant

de l'idée démocratique. Cette affirmation paraitra paradoxale aux esprits superficiels qui jugent de tout d’après la forme extérieure et qui ne veulent pas se donner la peine de regarder au fond des choses. Nous la maintenons cependant. En effet, le mouvement démocratique allemand a jailli de la conscience nationale, sous le choc de la guerre, avec une spontanéité révolutionnaire. Il a triomphé des plus vives résistances intérieures.

« L’essor de l’idée démocratique en Allemagne n'apparaîtra dans toute sa puissance qu’après la guerre. On est en droit d'espérer que, une fois disparues les ‘prétendues nécessités de guerre dont les gouvernements des puissances occidentales se prévalent pour tenir en échec les libertés publiques, le sentiment de la souveraineté populaire 8e réveillera dans ces peuples et qu'ils éprouveront le besoin de demander des comptes à ceux qui ont abusé du blanc-seing de la nation pour prolonger inutilement la guerre.

« Le monde en s’inclinant devant la véritable démocratie, saura la distinguer de ce qui n'en est que la contrefaçon. Trop longtemps on a abusé du nom de démocratie pour en décorer des régimes politiques où règne, sous cette

La question d’Autriche-Hongrie :

fausse enseigne, la dictature d'un parti ou une dictature parlementaire. Le peuple allemand n'éprouve aucune tentation de reproduire chez lui pareille caricature de la liberté et de la soueeraineté. populaire. Pour. s'en préserver, il,

faudra qu'il donne une forme de vie nouvelle au

principe démocratique. Le règne de la majorité n’est pas tout, en effet ; ce n’est mème qu'une garantie illusoire ; car un tyran, qu’il soit prince ou avocat, saura toujours 8e seroir des pleins pouvoirs que lui aura conférés une maÿorilé moutonnière, pour gouverner contre les intentions du peuple. Le peuple allemand devra veiller à ee que l'Etat populaire soit dirigé par les meilleure et les plus capables, et non par eeux qui ont le plus de rouerie et de faeonde. Il comparera les grands et précieux enseignements de son histoire avec les déplorables expériences des Etats occidentaux et de la Russie et saura tirer de son propre fonds les formes politiques qui seront l'expression sincère du principe démocratique, formes que les autres grands peuples n'ont pas su trouver! »

Ce que, dans le monde civilisé, est appelé l'oligarchie, c’est-à-dire le gouvernement où le pouvoir est dans les mains de quelques puissants tels que T'issa, Wekerlé, Andrassy, Apponyi, elc., les Magyaro-Allemands le considèrent comme la démocratie véritable. Le régime

de la souverainèté nationale qui existe dans les

démocraties de l'Occident, c'est, pour les Magyars, la contrefaçon de la démocratie !

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Les utopies de M. William Martin

Dans son article du 16 août intitulé : « La nation tchèque », M. W. Martin, rédacteur politique du « Journal de Genève », expose sa conception de la réforme de l'Etat austrohongrois. «La solution du problème autrichien comme du problème russe la plus favorable à la fois aux peuples et à l'Europe est le fédéralisme. Tous les Alliés et même leurs publicistes les plus hostiles à l'Autriche-Hongrie en conviennent mais ils croient que pour réaliser l’union des peuples de la Monarchie il faut détruire tout d'abord la Monarchie elle-même. Quant à nous il nous paraîtrait plus simple, plus logique, plus sûr et plus court de s'appuyer sur l'homme de l'empire qui est le plus grand partisans du fédéralisme, sur l’empereur ».

M. Martin oublie que dans leur conception du problème austro-hongrois, les Alliés et leurs publicistes partent de deux principes : celui de la liberté, qui se traduit par la reconnaissance du droit des peuples de disposer de leur sort, et celui de la justice qui s'exprime par la devise: pas de négociations possibles avec l’ennemi avant la victoire. On ne négocie pas avec le coupable mais on le juge et on le condamne: Pour les Alliés l'Autriche est coupable aussi bien que l'Allemagne. Aussi le fait qui

parait si simple, si logique, si sûr et si court, à

M. Martin, qui, en homme pratique par excellence, préconise une politique de marchandage — ne paraît l'être autant aux Alliés et à leurs publicistes. Ceux-ci préfèrent s'appuyer sur leur principes que sur l’empereur, fût-il comme le prétend M. Maïtin, le plus grand partisan du fédéralisme.

M. Martin, lui, paraît étre un peu en retard avec ses principes. En vérité, il en est encore à ceux qui avaient cours au XVe siècle. Il prétend même que les Alliés lutlent pour l'équilibre européen ! Quant au principe de nationalité qui est un principe moderne,

M. Martin n’en tient guère compte, sinon il n'aurait pu s'exprimer dans le même article au sujet de la nation tchèque, comme suit: « Maïs, objectera-t-on ; vous oubliez en tout ceci, les intérêts et les droits des Tchèques ? Nullement, ils nous tiennent à cœur. Mais les peuples si vaillants qu’ils soient ne peuvent rien contre la géographie ». C'est là non seulement la négation du principe de nationalité, mais encore de celui de la liberté et de l'indépendance des peuples en général, la négation des principes sur lesquels est basée l'existence de la Suisse elle-même. Si Guillaume Tell et les héros du Grütli se faisaient de la liberté l'idée que se fait M. Martin, la Suisse aurait le même régime dont jouit l'infortunée Bohême. Heureusement, ils se trouvaient en'Suisse des hommes qui ne se résignaient pas à accepter d'emblée les raisons « géographiques ».

Le fédéralisme autrichien dont M. Martin fait un si grand cas est une pure utopie puisque

tout dans la double Monarchie conspire contre …

lui. Il n'y a guère de facteur politique de quelque importance, excepté l'empereur — et encore — qui ne s’y oppose. Or, l'essence même du fédéralisme c’est le consentement des confédérés. Cependant tous les peuples de l'Autriche-Hongrie, aussi bien les peuples opprimés que les peuples privilégiés, combattent de toute leur force, l’idée même de la réforme fédéraliste ; aucun d'eux n'y trouvantson compte.

Ce sont d’abord les Allemands d'Autriche, les mêmes qui autrefois avaient empêché le premier essai de conciliation des nationalités en renversant le ministère Badeni en 1897', Leur Conseil populaire, vienne de voter une protestation contre la réforme fédéraliste en vue.

En second lieu viennent les Magyars, comme

Le compte Badeni décréta les ordonnances du 5 avril 1897 sur la parité des langues en Bohème et en Moravie.

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