La Serbie

TRÉDACTION et ADMINISTRATION | @, rue du XXXI Décembre - Genève Téléphone 14.05 $

A l'occasion de l'ouverture de l’Assemblée | Nationale à Belgrade, le Prince Régent | Alexandre a prononcé le discours suivant :

| Messieurs les Députés,

ns 4. + ; p: ” . .

_ Au nom de Sa Majesté le roi Pierre, je vous salue vous et iout le peuple que.vous repré_ sentez aujourd'hui, je salue tous nos frères … portant le nom glorieux de Serbes, Croates

4

. finie de voir le jour où pour la première fois __ dans notre longue vie historique, nous nous sommes élevés jusqu’au bonheur d’entreprendre, en collaboration avec la couronne et le peuple, et groupés en unique Assemblée Nationale, en maîtres indépendants de notre destinée, la noble tâche d'assurer le bien-être à notre belle patrie unifiée, à tous ses fils et _ à toutes ses filles. Séparés depuis des siècles, mais conservant toujours le souvenir de Îa Patrie, séparés par la force brutale des empires mondiaux de Rome, de Byzance, de _ Vienne et de Constantinople, mais ne déses… pérant jamais, nous avons gardé avec fidélité _ les saintes traditions de nos ancêtres. Sur la base de cette origine commune, nous avons vécu, pendant des siècles. des jours difficiles et nous avons été exposés à des influences diverses, mais nous avons toujours su garder notre nom, en développant autant que possible nos qualités nationales, et en sachant et en nous rappelant toujours que nous étions des frères, que nous ne faisions qu'un. Le . jour où l'ennemi a été vaincu par mon héroïque armée, qui déjà, par sa formation, était le symbole même de notre unité nationale,

+7

… liés; au moment où le soleil de la justice jetait son éblouissante clarté sur la terre ensan_ glantée, notre peuple aux trois noms, mais _ animé d'une seule pensée, d'une seule vo_… fonté et d’un seul désir, s'est levé semblable à _ un géant depuis les Alpes jusqu'aux Balkans. - C'est avec joie et reconnaissance que je nomme ici les interprètes de cette volonté qui furent en même temps les artisans de cette victoire : les représentants du Conseil national et les signataires de l'Assemblée nationale de Voivodina, pour notre peuple de l'ancienne monarchie austro-hongroise ; les représentants de l’Assemblée nationale du Royaume de Serbie et de la Grande assemblée du Royaume du Monténégro. Leurs résolutions ainsi que ma réponse royale ont été acceptées avec enthousiasme par Sarajevo et Belgrade, Zagreb et Novi Sad, Lioubliana et Cettigné, Split et Skoplié. Mais plus encore que par cet enthousiasme émouvant, notre unanimité s'est manifestée | par le calme et la digne attitude de notre peuple depuis le jour où la liberté a com_ Mencé à régner jusqu’à aujourd'hui. Ainsi en a-t-il ététbien que notre peuple ait encore de dures épreuves à supporter. En maints endroits, en effet, l'étranger dé: tient des parties de notre territoire à peine lihéré. Si la situation devait rester ce qu’elle es, nous n'aurions pas été à la hauteur de C8 précieuses victimes tombées sur l'autel de B libération et de l'union. Que soit toujours Présent à l'esprit le souvenir de ces saintes Victimes | Qu'il nous suive partout, dans tous nos travaux, nous rappelant que nous avons le devoir de ne pas dévier du droit chemin. Les siècles passeront, mais, jamais, nous Narriverons à payer notre dette envers l'armée de nos héros et martyrs tombés pour la éfense de la patrie et pour la réalisation de Son grand idéal, Grandes et chères nous sont ces victimes | Gloire et hommage à tous ceux, “nus ou inconnus, dont les tombeaux cour Vrent nos monts et nos vallées, remplissent la Profondeur des mers et nos champs de guet el S serviront d'exemple jusqu'aux derniers de 108 enfants, Ils leur apprendront comment on

_ et Slovènes. Je partage avec vous la joie in- | tager toutes nos souffrances jusqu'à l'heure où

_ ainsi que par les brillantes armés dé :u5s ali

JOURNAL POLITIOU

Prix du Numéro

2 10 Centimes

Paraissant tous les Lundis

sert la Patrie et comment on fait pour arriver au premier rang de ceux dont l'humanité garde la mémoire.

De même je conserve grave dans mon cœur le souvenir reconnaissant de tous les capitaines,

officiers: et soldats des armées_alliées de terre.

et de mer, venus pour combattre sur notre front d'Orient et qui ont su avec une abnégation admirable, côte à côte avec nous, par-

nous fut réndue la liberté menacée. Hommage à eux tous! à l’armée innombrable de nos compagnons de guerre, grands protecteurs de la liberté et de la justice humaine qui ont arraché au péril le droit à la vie indépendante! Notre reconnaissance va à tous les gouvernements alliés qui, courageusement, sont entrés avec nous dans la lutte gigantesque dont ils sont sortis Victorieux.

J'ai toute raison de croire que les mêmes marques de sympathie que les Alliés ont toujours témoignées à mon héroïque armée se manifesteront dans les décisions du Congrès de la Paix envers le peuple et le pays qui ont su faire l'instruction de cette armée et lui donner les qualités dont elle a fait preuve.

Cette fidélité inébranlable par laquelle nous nous sommes distingués dans toutes les autres épreuves et qui nous a permis de résister au doute amer et au désespoir cruel constituent une garantie suffisante du fait que le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes sera toujours à l'Orient, une fois que satisfaction aura été donnée à ses légitimes droits, le gardien de la justice et de la liberté qui sont choses sacrées pour les grands esprits des nations ailiées. ë =

Bien qu'unifié, nous n'en resterons pas moins toujours petit à côté de nos grands alliés. Mais nous sommes convaincus qu'on ne prendra pas l'étendue de notre territoire comme mesure de notre droit. C'est dans cette conviction que nous sommes fondés à espérer qu'on ne voudra pas nous imposer ce qui, par erreur et sous la pression des événements, a été décidé à notre insu et relativement à notre sort Nous ne demandons de sacrifice à personne; nous ne réclamons que ce qui doit être utile non seulement à nous, maïs à tous nos alliés, ce qui doit nous épargner des difficultés à nous aussi bien qu'à d’autres, et de nouvelles épreuves aux générations futures. Nous espérons que nos nobles alliés ne suivront, en ce qui nous concerne, que les principes prescrits, par euxmêmes pour les décisions du Congrès et proclamés d'avance et publiquement.

Nous ne demandons rien qui soit injuste, parce que nous ne demandons rien qui appartienne en réalité à autrui. Nous voulons que nos frères, ainsi que les autres habitants qui vivent en commun avec eux dans notre maison nationale, décident librement de leur sort.

Messieurs les représentants de la nation | J'espère que la Représentation nationale con-

tribuera pour sa part à obtenir que les questions

de notre avenir soient réglées au grand Congrès favorablement pour notre Juste cause. Les tâches qui se dressent devant nous sont nombreuses ct difficiles. L'avenir attend de nous que vous prépariez et élaboriez les éléments les plus indispensables à notre nouvel édifice d'Etat, en vous entourant de toutes les précauesi sans que vous vous relächiez dans votre zèle. C'est avec impatience que le pays attend de vous la réparation des torts que lui avait causés l'ennemi, et que vous vous mettiez sans retard à briser les chaînes séculaires maintenues encore chez nous par le

système étranger. ï , J'espère quen P

tions, mais au

lein accord parlementaire avec mon gouvernement, vous parviendrez à surmonter victorieusement les grandes difficultés qui se sont présentées dès le début même de notre nouvelle vie d'Etat et nationale. J'espère qu’à cet égard, votre activité sera d'une haute

Rédacteur en chef : D: Lazare MarcOvITCH, professeur à l’Université de Belgrade

he G

fportance, surtout si cette activité se manifeste féconde dans les travaux qui jusqu'à ce jour ont attendu une telle représentation nationale. Je tiens à insister particulièrement sur ce besoin urgent qu'a le cultivateur, après mille années d'une vie pénible, d’être affranchi des liens qui le font encore dépendant du propriétaire de la terre qu'il laboure, afin de devenir le maître de la motte qu'il arrose de sa-sueur. La fraternité qui nous unit, la justice

E HMEBDOMADAIRE

A LOFT i

%

. Genève, Lundi 7

Avril 1919

Suisse... .… 6fr. — parun

AONNEMENT } Autres pays. Ofr.— »

Les fruits du développement intérieur de l'Etat qui ont acquis à la Serbie sa juste renommée doivent être de même transportés sur toute l'étendue de (l'Etat, grâce à une constitution provisoire que nous aurons à observer, jusqu'à ce que la grande Skoupchtina nationale élabore et établisse la loi fondamentale de notre Royaume. Messieurs les députés | Mon gouvernement soumettra à votre examen et à votre approbation d’autres projets que les

Sale qui doit nôus conduire et- l'intérêtde-|-moments-actuels nous obligent à présenter, à

Etat dont tous nous devons nous occuper, nous imposent de façon absolue de prendre cette décision. De même que le paysan libre et économiquement indépendant du Royaume de Serbie a pu développer sa force sociale, militaire et morale, de même son frère, dans toute l'étendue du Royaume, doit pouvoir dans le bonheur s'établir sur une base inébranlable qui permette à notre Etat d'attendre et de surmonter tout orage et tout événement dans les temps futurs.

étudier et à voter pour le relèvement le plus rapide possible du pays, pour son renouvellement et pour le rendre apte à la vie économique et à la culture intellectuelle.

Que la bénédiction divine repose sur vos travaux pour le bien de la patrie et du peuple et pour votre gloire | Je déclare ouvertes les séances de la Représentation Nationale du Royaume des Serbes, Croates et Slovènes

Vivent les fidèles et chers Serbes, Croates et Slovènes |

La CONFÉRENCE de PARIS et l'AVEHIR

Les déclarations de Tressitch-Pavitchifch

Une circonstance: fortuite vient de me permettre de recueillir les déclarations de M. Tressitch-Pavitchitch, personnalité modeste et très intéressante de l’ancien Reichrat, personnalité de premier plan de demain dans le nouveau royaume des Serbes, Croates et Slovènes.

M. Tressitch-Pavitchitch est, en eflet, ce député dalmate qui, alors que l’AutricheHongrié était encore puissante, porta cou-

rs van ama at Te te rar seb RS Th ln

coups à l'édifice suranné dé la monarchie, en signalant avec indignation dans ses discours, les horreurs du régime austro-bulgare en Serbie et en blâmant la politique germano-autrichienne.

M. Tressitch-Pavitchitch, qui a toute la sensibilité de l’âme slave, perçoit avec une singulière acuité les dangers de la situation présente. Peut-être a-t-il une vision trop pessimiste des choses. Mais sa connaissance parfaite des hommes de sa race et des problèmes balkaniques nous oblige à prêter une attention toute particulière à ses considérations politiques.

M. Tressitch-Pavitchitch exprime tout d’abord la profondeur de son angoisse :

— On pouvait s'attendre, dit-il, à ce que la défaite du féodalisme prussien et la victoire de la démocratie fassent triompher du même coup la liberté et la sincérité de la pensée, et entraînent la condamnation définitive des tortuosités et des équivoques de la diplomatie. L'arrivée au pouvoir d’un Lloyd George autorisait tous les espoirs. Or, que voyons-nous ? Même cet esprit si lucide, libéral et noble semble avoir subi l'influence du milieu. Cet admirable prototype de l’homme moderne, de l'homme d'Etat clairvoyant, qui a eu la furce et l'énergie de vaincre en Angleterre les éléments rétrogrades et flegmatiques et, sur le continent, d’abattre l’orgueil allemand, ne paraît plus assez puissant pour annihiler les eftorts des éléments réactionpaires et rétrogrades qui tentent actuellement d'empêcher tout progrès dans l’avenir, Et je pense à ce fameux traité de Londres, traité indigne de la France et de l'Angleterre, traité issu de la nécessité et de la crainte des Allemands, marché conclu au prix de la peau d’autrui, que Lloyd George persiste à considérer comme moralement obligatoire pour l’Entente et qui sera fatal à cette Italie que la diplomatie de France et d'Angleterre croit ménager en agissant ainsi, Les illusions impérialistes des nombreux diplomates de la Conférence leur eachent, de Jeur brouillard,

l'avenir de l'humanité et le soleil providentiel de l'amour humain. Ils envisagent toutes choses du point de vue de la politique nationale, qui conduit à la guerre, à la barbarie et à l’anéantissement, au lieu de s'élever à la hauteur des intérêts cosmopolites, de la civitas dei qui, seule, peut assurer la paix et le bien-être à tous. Si ces messieurs ne reviennent pas à temps à la raison, tout finira mal.

AY1. LÉ USSIUUL-E GYILULULGL CDV CALL GILICment sévère pour la Conférence. Il va même jusqu'à faire une comparaison entre elleet le traité de Brest-Litovsk, qu'il attaqua furieusement au Parlement autrichien, le 21 février 1918.

— Je crains surtout, dit-il, que cette Conférence ne prépare une guerre plus terrible que celle que nous venons de terminer, en abandonnant les principes wilsoniens qui sont les postulats d’une évolution progressive de l'humanité, de la justice immanente dans cette évolution. Nous, en eflet, qui avons versé proportionnellement le plus de sang pour la cause des Alliés, qui avons vu notre patrie atrocement ravagée, on voudrait nous contraindre d'abandonner à chacun de nos voisins — nous en avons sept! — des lambeaux de notre chair. Si les Italiens obtiennent tout ce qu’ils demandent, ils rendront impossibles notre existence et notre entrée dans la Société des Nations; ils nous provoquent à une guerre terrible pour eux et pour nous. La Conférence se montre même généreuse, à nos dépens, envers les Allemands et les Magyars. Ne pouvons-nous pas craindre, en eflet, de perdre toute une partie de notre territoire en Carinthie, en Siyrie, en Prekodravlié et en Baragna ! Quant à la folie des Roumains, elle va jusqu'à nous réclamer tout le Banat, sous prétexte de réciprocité pour les Roumains de Serbie, dont aucun ne veut savoir quoi que ce soit de la Roumanie. Nos Chopis, qui vivent encore sous la domination bulgare, ne nous seront pas rendus. Et la Grèce elle-même ! Par opportunité politique, nous devrons lui abandonner un quart de millions de Slaves et nous laisser rejeter de la mer Egée. Pourtant, elle n’ignore pas qu'une guerre avec elle ne serait pas bien coûteuse ! Il n’y a pas jusqu'aux Albanais qui ne redressent la tête.

Nous risquons de perdre ainsi deux

millions de compatriotes, tandis que les Etats étrangers n'auront pas un seul de