Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures
CHAPITRE SEPTIÈME. 209
les filles ne portant point les armes et ne pouvant point faire peur à l'ennemi. Dans son embarras, il eut la sottise de vouloir en cacher trois, comme s’il élait possible de cacher quelqué chose à l'œil céleste qui voit tout. Dieu, pour le punir de sa faute, prit ces trois filles, les trois plus belles, et en fit des vilas. Dès ce moment, elles errèrent dans l’espace, et comme elles vécurent honnêtement, elles ne furent point condamnées à périr dans le déluge. Prévenues, ainsi que le sage Noé, du cataclysme universel, elles entrèrent avec l'air dans l'Arche et y restèrent jusqu'à ce que la colombe y apportât la branche d’olivier. De région en région elles ont volé jusque dans les domaines de l’antique Serbie, et c’est là surtout qu’elles se plaisent. Elles ont naturellement la facullé de parler toutes les langues, mais c’est la langue slave qu’elles préfèrent. Comme les Slaves elles sont devenues chrétiennes, et souvent elles entrent invisibles dans les églises; elles protégent ceux qui combattent vaillamment sous l’étendard du Christ, et se montrent toujours hostiles aux musulmans!. »
La mythologie slave conserve les noms de quelques vilas, auxquelles sont attribuées des fonctions spéciales dans le monde surnaturel ; l'une d'elles, et c'est nécessairement la plus puissante et la plus invoquée, préside aux destins de la guerre : c’est Raviola. Déités surtout bienfaisantes, les vilas, irritées par l’orgueil ou le mépris de l'homme, peuvent pourtant perdre leur bon caractère et lui devenir quelquefois fatales.
A côté de ces bons génies (sticheion), nous trouvons des êtres présidant aux maléfices les plus redoutables et même les plus sanglants : c’est l’incube (mora ou morina); c'est le lutin (matsits); ce sont les feux folets (sviétchisé), dont les Monténégrins ont peur partout et
1 Turcs et Monténégrins.